
Alors que l’économie numérique prend de l’expansion et les achats omnicanal deviennent la norme, les données traditionnelles ne sont plus suffisantes. Anthony Okolie et Xin Chen, vice-présidente, Répartition des actifs, Gestion de Placements TD, discutent de l’importance des autres sources de données pour évaluer les impacts en temps réel sur l’économie et les bénéfices des sociétés.
Xin, commençons par une vue d’ensemble. Le coronavirus a fait bondir la demande pour les données alternatives. Les investisseurs recherchent des répercussions en temps réel sur l’économie et les bénéfices des entreprises. Tout d’abord, Xin, pouvez-vous nous expliquer ce que c’est, les données alternatives?
Oui, bien sûr. Les données alternatives, dans un certain sens, sont le contraire des données traditionnelles que les investisseurs peuvent trouver sur la plateforme Bloomberg ou dans les bilans financiers des entreprises. Elles sont donc un peu non conventionnelles. Elles sont créées de façon un peu plus créative.
Par exemple, les gens font habituellement le suivi du dépôt des bagages à l’aéroport comme moyen d’évaluer le trafic aérien. Ou ils examinent les mots-clés. Ils épluchent les mots-clés sur les sites Web pour déceler certaines impressions sur les actions. Ils peuvent aussi consulter des données géolocalisées ou des images satellites pour suivre les activités des consommateurs. Ce sont tous des exemples de données alternatives.
Et comment la pandémie a-t-elle créé ces données non conventionnelles?
Oui, donc, essentiellement, il y a de plus en plus d’efforts conjoints entre un grand groupe de personnes pour vraiment mener des recherches et, en fait, se joindre aux efforts pour régler le problème de la COVID. Par exemple, Google et Apple ont commencé à partager des données sur la mobilité plus tôt cette année dans le cadre de ces efforts. Et OpenTable publie ses données sur une base quotidienne pour soutenir le secteur de la restauration.
De plus, le milieu universitaire et les institutions publiques ont également commencé à recueillir des données. Ils publient aussi publiquement toutes ces données. En fait, il y a même plus de données que les gens peuvent utiliser. Pour nous, c’est une bonne façon, une autre façon, d’accélérer les activités économiques depuis le déconfinement.
C’est ce qui m’amène à ma prochaine question. Vous avez donc toutes ces données alternatives. Comment les utilisez-vous dans vos décisions de placement courantes?
Oui, c’est une très bonne question. Nous avons donc une réserve de placements. En fait, nous nous sommes adaptés à ce scénario précis et aux données supplémentaires. Par exemple, nous avons ajouté une catégorie COVID-19 à notre cadre de travail. Par exemple, cela comprend des matrices comme la courbe quotidienne des cas partout dans le monde, le taux de reproduction, la capacité des soins de santé et des choses de ce genre.
Nous utilisons aussi l’aspect économique des autres données provenant de cette nouvelle vague de données pour compléter nos prévisions économiques et fondamentales. Voilà donc les mesures générales que nous avons prises en ce qui concerne le processus d’investissement. Par exemple, nous avons également utilisé les données pour un deuxième emplacement.
En gros, un bon exemple serait que les données sur les dépenses montrent des dépenses très solides dans le commerce électronique, généralement des appareils technologiques. Les gens travaillent probablement de la maison pendant cette période, malgré l’effondrement des autres dépenses globales durant la pandémie. C’est ce qui nous a amenés à gagner plus de confiance pour surévaluer les secteurs des logiciels et des semiconducteurs.
La construction résidentielle est un autre exemple. Nous avons trouvé ça très intéressant... les gens dépensent plus pour les rénovations domiciliaires. Les activités de construction résidentielle ont aussi été plus fortes dans les données alternatives au début. Ça nous a amenés à surclasser l’indice des constructeurs d’habitations, qui a aussi surpassé considérablement le cours de l’indice S&P depuis le déconfinement.
Ce sont d’excellents exemples. Est-ce qu’il y a autre chose qui vous a surprise ou qui a changé votre point de vue sur la reprise après la pandémie en raison de toutes ces données alternatives?
Oui, en fait, la vitesse à laquelle nous sommes revenus à la normale a été plus rapide que nous l’avions prévu au départ et que beaucoup de gens l’avaient prévu pour les États-Unis et l’Europe. Par exemple, les États-Unis ont commencé à rouvrir leurs commerces à la mi-avril. Et à la mi-mai, la plupart des États s’étaient déjà déconfinés, du moins en partie.
Il y a aussi eu une très forte remontée généralisée qui a mis en lumière les données sur la mobilité. Et nous avons découvert que ce n’était pas seulement le rebond initial. Ce qui nous a encore plus surpris, c’est que l’élan s’est maintenu après que la formule initiale de deux semaines a été dépassée. Nous avons donc commencé à reconnaître que la capacité d’adaptation à la nouvelle normalité était en fait très élevée. C’est ce qui nous a amenés à repousser nos attentes à l’égard de la reprise.
L’Europe est un autre exemple. Les gens n’étaient donc généralement pas très optimistes à l’égard de l’Europe, parce qu’elle a été durement touchée par la pandémie. En Italie, par exemple, le système de santé s’est complètement effondré. Les décès ont vraiment explosé. Les gens étaient donc un peu pessimistes.
Toutefois, nous avons constaté que les premières données à haute fréquence indiquant leur mobilité, les réservations de restaurant et le trafic aérien sont en fait revenus à la normale, et plus important encore, sans déclencher davantage de nouveaux cas. Ils sont donc en mesure d’aplatir leur courbe de cas en même temps. Ces données nous ont donc donné plus de confiance pour être plus optimistes à l’égard des actions mondiales par rapport à la moyenne des investisseurs institutionnels.
Ces données alternatives semblaient donc être très importantes. Même si une bonne partie de ces données-là a été corroborée par la pandémie, à votre avis, est-ce qu’elles sont là pour rester?
Je dirais que certaines données alternatives pourraient disparaître, en particulier celles qui sont propres à la COVID, si ce virus disparaît. Toutefois, comme les gens se sont déjà adaptés à une information plus rapide et plus fréquente qu’ils peuvent utiliser avec ce qu’ils connaissent déjà, cette tendance est difficile à renverser. Je pense donc que les données alternatives vont rester.
Et en fait, elles seront plus populaires. Et il y aura plus de gens qui vont les utiliser pour obtenir des renseignements supplémentaires grâce à cette information rapide. C’est comme lorsqu’on s’habitue à Internet et qu’on lit les nouvelles plus vite, on ne revient pas aux journaux papier.
Xin, merci beaucoup pour votre analyse.
Merci. Merci de m’avoir invitée.
[MUSIQUE]