
Facebook a récemment enregistré des bénéfices solides en raison du trafic et de la vente de publicités durant la pandémie. Mais l’importance croissante accordée à la protection des renseignements personnels des utilisateurs pourrait-elle nuire à l’augmentation de ses revenus? Anthony Okolie et Andriy Yastreb, analyste, Télécommunications et médias à Gestion de Placements TD, discutent des scénarios haussier et baissier pour Facebook.
Oui, Tony. C’est surprenant pour une entreprise de cette taille, mais sa croissance est très rapide. Cette dernière découle essentiellement de l’activité des consommateurs, de la publicité numérique et de l’argent de la publicité qui passe du monde réel au monde numérique. Et si vous consultez le prévisionnel consensuel de Bloomberg, Facebook devrait augmenter ses revenus de 34 % cette année et de 19 % supplémentaires l’an prochain.
Ensuite, la société est fortement exposée à la croissance future des technologies.
Oui. Et je pense que le domaine de la réalité virtuelle et de la réalité augmentée se démarque. C’est un secteur qui a connu une belle croissance récemment pour Facebook. Si vous regardez ce graphique, vous voyez que les deux derniers trimestres, il y a eu une forte hausse dans ce revenu, qui comprend la réalité virtuelle. Et ce qui explique cela, c’est le lancement de Facebook des casques d’écoute en réalité virtuelle Oculus 2 en fin d’année dernière. Cela a entraîné une croissance des revenus à trois chiffres de plus de 100 % sur 12 mois.
Et ce qui est vraiment intéressant, c’est que Facebook a compris que les applications de réalité virtuelle commencent à se développer. Elles ne se limitent plus aux jeux et aux divertissements, comme par le passé. Elles deviennent plus « sérieuses ». Avec, par exemple, des outils de collaboration et de productivité pour les entreprises. Je pense que la réalité virtuelle devient de plus en plus réelle et Facebook est une des meilleures façons d’être exposé à cette tendance.
- Enfin, les actions de Facebook ne sont pas chères.
Oui. Si vous regardez les ratios auxquels Facebook négocie, ils correspondent à 20 fois le ratio cours/bénéfice par rapport au bénéfice de l’année prochaine. Et si l’on compare avec le marché, l’indice S&P 500 se négocie essentiellement au même ratio. Or, Facebook a de bien meilleures perspectives de croissance à long terme que la société lambda du S&P 500. De ce point de vue, Facebook est sous-estimée.
Des facteurs très importants expliquent donc pourquoi Facebook est à la hausse. Examinons maintenant un scénario baissier. Premièrement, Facebook fait face à de nombreux risques réglementaires.
Oui, le risque lié à la réglementation est certainement le risque numéro un pour Facebook. La société fait l’objet d’un certain nombre d’enquêtes et de poursuites antitrust partout dans le monde. Elle doit aussi faire face à des problèmes politiques et à une réglementation accrue, potentiellement. Et si vous regardez en arrière, au moins au cours des cinq dernières années, son action a été malmenée. Et, cela devrait rester une menace pour les cinq prochaines années.
Ensuite, la société dépend toujours de l’écosystème des téléphones intelligents.
Facebook a très bien réussi, précisément parce qu’elle a pu accéder aux données de nos téléphones intelligents, apprendre ce que nous faisons et cibler la publicité pour les clients de façon précise. Apple a récemment annoncé un grand changement qui réduira la capacité d’entreprises comme Facebook à recueillir des données sur leurs clients et à les utiliser pour des publicités ciblées.
De ce point de vue, le risque est très nouveau. Cette mise à jour logicielle est en cours ce trimestre. C’est quelque chose de complètement nouveau et qui se produit en ce moment même. Il est important de noter que tout le monde sera touché. La capacité à recueillir des données sur les clients des entreprises autres qu’Apple sera impactée. Mais Facebook est relativement bien positionnée par rapport à de nombreuses autres sociétés, car elle dispose de beaucoup de données de première main de ses propres applications.
- Enfin, parlez-nous de la concurrence croissante, surtout dans le secteur des technologies.
Oui. Depuis l’existence de Facebook, depuis son lancement, on a toujours craint l’arrivée d’une nouvelle application ou d’un nouveau site qui finirait par voler les utilisateurs de Facebook. Nous avons vu Twitter, Pinterest et, plus récemment, TikTok, qui attire beaucoup de clients. En même temps, Facebook se porte très bien. Il y a toujours un risque d’innovation et de perturbation pour toute entreprise. Et la meilleure défense des entreprises contre cela est d’innover par elles-mêmes. Et Facebook a prouvé au fil du temps qu’elle sait le faire.
- Je veux maintenant avoir votre avis global. Mais avant, j’aimerais en savoir un peu plus sur la monnaie numérique de Facebook, Diem, et comment cela s’inscrit dans votre vision globale.
Je crois que Diem, qui est essentiellement le projet de Facebook d’avoir sa propre cryptomonnaie, en est encore à ses balbutiements. Elle ne représente encore pas grand-chose pour Facebook en général, et il y a encore beaucoup d’incertitude. Pour moi, c’est essentiellement une option gratuite pour Facebook de développer sa propre monnaie et d’établir son propre écosystème. Mais il est encore très tôt.
- Compte tenu de tous ces facteurs, comment voyez-vous les choses pour Facebook?
Écoutez, je pense que Facebook a beaucoup d’atouts. La société affiche un très bon rendement et une croissance très rapide. Elle n’est pas chère. Mais en même temps, il y a toujours un risque lié à la réglementation. On peut s’inquiéter de sa capacité, à court terme, de recueillir des données et de cibler ses clients. Facebook est actuellement quelque peu limitée par ces facteurs.
Andriy, merci d’avoir participé à cette webdiffusion.
Merci, Tony.
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