Les données sur l’inflation de la consommation aux États-Unis montrent un fléchissement des prix en décembre. Greg Bonnell discute avec David Sekera, stratège en chef des marchés américains à Morningstar Research, de ce que les derniers chiffres de l’IPC pourraient signifier pour les marchés en 2023.
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[LOGO AUDIO] L’inflation est au centre des préoccupations des investisseurs depuis un certain temps. Le dernier point sur les prix aux É.-U. montre que ces pressions s’atténuent. Qu’est-ce que cela signifie pour les marchés cette année? Nous recevons David Sekera, stratège en chef des marchés américains à Morningstar Research. David, je suis heureux que vous soyez ici, surtout aujourd’hui, car on reçoit d’autres données qui indiquent que l’inflation continue de diminuer, bien qu’elle soit encore exceptionnellement élevée. En tant qu’investisseurs, qu’est-ce qu’on doit faire de cette information? Eh bien, je pense qu’aujourd’hui montre très bien ce à quoi le marché devrait ressembler au cours des prochains mois. Nos perspectives pour 2023, les turbulences à court terme, mais l’horizon qui s’éclaircit, je pense que cette année se déroulera en deux temps. Il y aura beaucoup de volatilité au premier semestre, mais au deuxième semestre, beaucoup des facteurs défavorables relevés en 2022 devraient non seulement s’atténuer, mais commencer à se transformer en facteurs favorables. Et je pense que cela aidera les marchés à se redresser vers l’évaluation intrinsèque à long terme des marchés. De toute évidence, l’inflation est la clé et on commence à voir le repli graduel des niveaux élevés. Il semble que ce soit un phénomène à long terme pour cette année. On n’obtiendra pas une réaction du jour au lendemain. On va voir les choses se faire petit à petit. En 2022, au début de l’année, on pensait que les marchés étaient surévalués, qu’ils étaient allés trop loin en territoire baissier et qu’ils étaient maintenant nettement sous-évalués. Le marché a dû composer avec quatre difficultés l’an dernier. On pense que deux d’entre elles commencent à s’atténuer. La hausse des taux d’intérêt à long terme à laquelle à on s’attendait est maintenant derrière nous. On a également remarqué que l’inflation avait atteint un sommet il y a quelques mois et qu’elle continue de baisser. L’inflation moyenne pour cette année devrait être de 2,9 % et même en deçà de 2 % l’an prochain. Les deux choses que je surveille pour ce premier semestre, c’est l’économie américaine et la Réserve fédérale. Pour ce qui est de l’économie américaine, bien que le quatrième trimestre de 2022 était acceptable, on pense que l’économie ralentira au cours des deux prochains trimestres, qu’elle sera plutôt stagnante, voire en récession avant qu’elle commence à accélérer de nouveau au deuxième semestre de l’année. En ce qui concerne la Réserve fédérale, il semble qu’on ait encore au moins une hausse de taux en plus, sinon deux, avant que ça ne s’arrête. Cela explique en partie pourquoi on pense que les choses commenceront à s’améliorer au deuxième semestre de l’année, la Réserve devrait vraiment faire une pause sur les augmentations et elle pourra commencer à se concentrer de nouveau sur son double mandat, non seulement l’inflation, mais aussi la maximisation de l’économie pour atteindre le plein emploi. Au deuxième semestre de l’année, l’inflation continuant de reculer et l’économie stagnant au premier semestre, cela la poussera à effectuer un virage et, au deuxième semestre de l’année, à passer à une politique d’assouplissement. C’est le grand débat, semble-t-il, en ce début d’année entre ce que la Fed et d’autres banques centrales indiquent, d’abord qu’elles ont peut-être pris un peu d’avance, puis qu’elles vont rester à ce niveau pendant un certain temps. Mais le marché obligataire n’est pas de cet avis. Il s’attend à une baisse d’ici le deuxième semestre de l’année. Le marché obligataire va-t-il gagner dans cette divergence de points de vue? Le marché obligataire est toujours l’éléphant dans la pièce, il faut donc y porter attention et le prendre en compte. Pour ce qui est des taux d’intérêt à long terme, on pense qu’on est dans la moyenne de ce qu’on prévoit pour cette année, soit à 3 et 1/2 %. Cela dit, compte tenu de la baisse de l’inflation, en particulier pour le deuxième semestre de cette année, on pense que les taux d’intérêt à long terme pourraient se redresser. On prévoit un taux de 2 et 1/2 % pour 2024. Le marché obligataire, bien que l’année dernière ait été la pire de son histoire, comme on l’a vu avec les titres à revenu fixe, semble beaucoup mieux parti et surtout au deuxième semestre pour les investisseurs en titres à revenu fixe. Donc on devrait arriver au deuxième semestre de l’année, où on espère comme vous le dites, que les choses commenceront à aller mieux, jusqu’à quel point la volatilité pourrait-elle être importante d’ici là? Oui, c’est toujours difficile à savoir. Le marché semble avoir touché un creux aux États-Unis en octobre de l’année dernière. Je suppose que cela devrait durer. Cela dit, on pourrait facilement voir une variation de quelques pour cent des prix quotidiens, soit une hausse de 5 %, une baisse de 5 %, probablement dans une fourchette de négociation pour les prochains mois. Et je pense que le marché surveillera très attentivement les indicateurs économiques à mesure qu’ils se manifestent. Au cours des deux ou trois prochaines semaines, la publication des bénéfices commencera et les gens se concentreront sur les prévisions de 2023 de nombreuses entreprises surtout celles des banques qui sortiront demain. Encore une fois, selon la forme que prendront ces conseils, on pourra voir les gens réévaluer leurs évaluations en fonction de ces BPA. Parlons-en un peu, parce qu’on a eu des avertissements… Et je suppose que l’argument le plus optimiste… pardon, l’argument le plus baissier pour ce marché, c’est qu’on n’a pas encore vu toutes les entreprises déclarer : voici l’état de l’économie. Voici le changement qu’on a observé dans la consommation en raison de la hausse des taux. Et voici ce que cela signifie pour les résultats. On n’a pas encore pris ça en compte. Cet argument est-il fondé? Eh bien, cet argument est certainement valable, mais je pense aussi qu’il faut se demander si on négocie ou si on investit. Si l’on examine les aspects techniques du marché, on voit beaucoup de volatilité. Les gens tentent de jouer sur les marchés au jour le jour selon ces données économiques. Mais je pense qu’en tant qu’investisseur à long terme, il faut prendre du recul et réfléchir vraiment à ce que les entreprises peuvent générer à long terme, et, encore une fois, on utilise un modèle de flux de trésorerie actualisé là. On tente de déterminer la valeur intrinsèque d’une entreprise en fonction des flux de trésorerie à long terme qu’elle peut générer. Donc, même si les bénéfices sont volatils à court terme, quand on pense comment cela influe sur la valeur intrinsèque d’une société, habituellement un gain surpassé ou raté peut donner un écart de 3 % à 5 % dans la valeur intrinsèque s’il diffère de ce qu’on avait prévu. Mais en réalité, on recherche ces changements dans les activités sous-jacentes à long terme et si cela change ou non nos projections et nos prévisions. Encore une fois, on va surveiller la situation au premier semestre de cette année avec les chiffres d’orientation mais, compte tenu de ce à quoi on s’attend, on pense que les marchés sont nettement sous-évalués. En fait, nos évaluations remontent à 2010, on est en territoire plutôt rare, dans la mesure où le marché américain se négocie à un cours inférieur à ce qu’il était dans le passé. Encore une fois, il y a beaucoup de volatilité à court terme, mais pour les investisseurs axés sur le long terme qui peuvent traverser cette période de volatilité, je pense que les choses vont beaucoup s’améliorer au deuxième semestre de cette année et à l’approche de 2024. Donc, à long terme, les choses semblent assez prometteuses. Qu’est-ce qui pourrait faire échouer cette thèse? Qu’est-ce qui pourrait l’empêcher de se produire au deuxième semestre de cette année? Eh bien, notre scénario de base pour l’économie américaine est, encore une fois, qu’elle stagnera et qu’elle pourrait connaître une récession. Et à ce stade, notre équipe économique américaine affirme que le potentiel de récession est de 30 % à 50 %. Et si cette récession survient, son scénario de base sera court et limité. Donc, si la récession devait être beaucoup plus profonde et/ou durer plus d’un trimestre ou deux, cela exercerait certainement beaucoup de pressions à la baisse sur les bénéfices et des pressions à la baisse sur nos évaluations également. L’autre facteur qui pourrait être imprévisible, c’est qu’on pense que la majorité des hausses de taux d’intérêt à long terme sont derrière nous. Si la période de 10 ans commençait vraiment à remonter sur le plan des taux, cela pourrait faire des ravages dans les actions de croissance. Il y aura beaucoup de pressions à la baisse sur certaines de ces actions à mégacapitalisation de croissance qui avaient subi des pressions l’an dernier. Et encore une fois, comme la capitalisation boursière est très élevée, ça pourrait aussi faire baisser les évaluations boursières. [LOGO AUDIO] [MUSIQUE]