
Avec le T4, les banques canadiennes ont fini 2020 bien au-delà des prévisions. Kim Parlee et Mario Mendonca, directeur général, Valeurs Mobilières TD, nous disent si cela augure bien pour 2021 et si les banques et assureurs bénéficieront de la reprise économique qui viendra avec la disponibilité des vaccins.
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Mario, je sais que vous venez de publier une excellente note sur les banques et une note plus générale sur ce qu’il faut surveiller pour l’année à venir. J’aimerais commencer, si vous le permettez, par le quatrième trimestre. Et vous dites que les excellents bénéfices... je crois qu’on a vu quelques pics à tous les niveaux... n’auraient pas une grande valeur prédictive. Pourquoi?
Eh bien, les banques ont toutes surpassé les chiffres consensuels et mes chiffres, mes estimations, d’un montant très élevé. Je crois que dans le cas de la BMO, ça atteint un pourcentage aussi élevé que 26 %. Et ce qu’on a observé au cours du trimestre, c’est que les pertes sur créances ont été extrêmement faibles... 27 points de base de pertes sur créances douteuses au cours du trimestre. Cela se compare à ce qui serait plus normal pour les banques... soit environ 40. Ce qui leur a vraiment profité durant le trimestre, c’est toute l’aide gouvernementale et les reports de paiement que les banques ont établis. Et donc, on s’attend vraiment à ce que les pertes sur créances augmentent en 2021. Et pour cette raison, j’ai considéré que les bénéfices réels du trimestre n’avaient pas une grande valeur prédictive.
Parlons un peu de ce qui pourrait avoir une plus grande valeur prédictive. Tout au long de votre note, vous avez beaucoup insisté sur la composition des activités, l’importance des sources de revenus et des bénéfices des banques et les différences entre elles. Pour commencer, ce que nous avons vu pendant toute l’année 2020, c’est que les banques qui se sont bien comportées avaient une meilleure composition des activités dans ce contexte, et c’était le contraire pour les banques qui n’avaient pas une telle composition. Vous pourriez peut-être nous expliquer ce que vous entendez par « composition des activités ».
Oui. En 2020, la composition des activités a eu plus d’importance qu’à peu près toutes les autres années auxquelles je peux penser. Et il y avait plusieurs façons d’examiner la composition des activités. Dans un cas, les banques qui sont très axées sur les marchés des capitaux, pensez à la Banque Nationale, à la Banque Royale, ces banques-là, qui sont très axées sur les marchés des capitaux, ont été avantagées, avec la hausse de 30 % des revenus tirés des marchés des capitaux sur 12 mois, en particulier les solides résultats commerciaux. Et les banques qui étaient plus axées sur les services de détail, pensez à la Banque Scotia, peut-être aussi à la CIBC, les banques qui étaient plus exposées au revenu d’intérêts net n’ont pas eu un aussi bon rendement, parce que les taux d’intérêt étaient plus bas, ce qui a fait baisser les intérêts nets.
Mais aussi les banques qui mettent vraiment l’accent sur les activités des clients. Pensez aux achats par carte de crédit, aux frais de dépôt, aux frais de paiement et aux revenus d’assurance. Les banques très axées sur les services de détail ont souffert du confinement, parce que les activités des clients ont fortement ralenti. Je considère donc la composition des activités comme un véritable facteur de différenciation en 2020.
D’accord, et qu’est-ce que ça dit pour 2021? Qui est en bonne position pour ce qu’on espère, c’est-à-dire la reprise?
Si nous partons du principe que le crédit ne passera pas à l’histoire en 2021, que les pertes sur créances seront plus élevées... mais les banques ont déjà accumulé des réserves importantes pour faire face à cette situation. Donc, si on précise que le crédit ne battra pas de records, la composition des revenus, encore une fois, sera très importante. Et dans ce cas-ci, je vous dirais qu’il sera très difficile pour les banques d’avoir en 2021 une autre année comme celle que les marchés des capitaux ont connue en 2020.
En fait, en 2009, lorsque les marchés des capitaux étaient très solides, les revenus tirés de ces marchés ont diminué pendant deux années consécutives, en 2010 et en 2011. Et c’est ce que je m’attends à voir en 2021 : une baisse des revenus tirés des marchés des capitaux. Il y a deux banques qui profitent vraiment des marchés des capitaux, la Banque Royale et la Banque Nationale. La Banque Royale tire 20 % de ses revenus des marchés des capitaux, et la Banque Nationale, environ 26 %. Donc, à mesure que les marchés des capitaux vont reculer, que les revenus de négociation vont ralentir, ces deux banques pourraient se retrouver dans une position légèrement défavorable. Encore une fois, les banques qui se concentrent davantage sur les services de détail, pensez à la Banque Scotia, à la CIBC, ces banques-là sont beaucoup plus axées sur les services de détail, et leur modèle d’affaires pourrait être légèrement plus favorable.
Vous mentionnez également dans votre note que vous avez constaté un changement en faveur des banques les moins performantes en 2020, par exemple la BMO, la Banque Scotia, et qu’elles reprennent du poil de la bête grâce aux évaluations boursières qui ont augmenté, je suppose.
Je crois que oui. Il y a un argument de base selon lequel, si vous achetez des actions qui ont été à la traîne au cours d’une année, elles sont plus susceptibles de rattraper l’écart d’évaluation au cours de l’année suivante. Et c’est une opération légitime que j’ai vu les investisseurs faire au fil du temps. Mais je pense qu’il se passe peut-être autre chose aussi, en particulier dans le cas de la Banque Scotia, qui a été durement touchée par les mesures de confinement dans son segment international. Les données fondamentales jouent donc aussi un rôle.
Parlons un peu de la Banque Scotia. Parlez-nous un peu plus de ce qui s’est passé avec cette banque.
Eh bien, au cours de l’été, les mesures de confinement se sont un peu atténuées en Amérique du Nord, surtout parce que c’était l’été et que le nombre de cas avait commencé à diminuer. Bien sûr, en Amérique latine, c’était l’hiver, et l’augmentation des cas s’est accélérée à un moment où les nôtres diminuaient. Et les mesures de confinement dans les pays comme le Pérou, le Chili et la Colombie étaient beaucoup plus strictes que celles en Amérique du Nord. J’ai entendu parler de l’armée qui arpentait les rues de Lima, au Pérou, en veillant à ce que les gens ne quittent pas leur domicile.
En raison de ce genre de confinement, la Banque Scotia a vu ses revenus de frais, ses frais de carte de crédit, ses frais de dépôt, ses frais de paiement et ses frais d’assurance diminuer considérablement. Ça a eu un très gros impact sur la Banque Scotia. Ce qui joue en quelque sorte en faveur de la Banque Scotia en ce moment, c’est qu’à l’approche de notre hiver, l’Amérique latine se dirige vers son été, donc les mesures de confinement prennent fin alors que les nôtres prennent de l’ampleur, en quelque sorte. Mais ce qui pourrait vraiment favoriser le commerce international au sortir de ces mesures de confinement, c’est que leur hiver va commencer en mai, mais d’ici là, je suppose que l’Amérique latine aura eu le temps de distribuer le vaccin. Ils n’auront donc peut-être pas à procéder à un confinement rigoureux durant leurs mois d’hiver, qui commencerait en mai 2021.
Donc, les activités internationales de la Banque Scotia, qui ont été très défavorables en 2020, pourraient en fait gagner du terrain en 2021. La Banque Scotia est l’un de vos meilleurs choix parmi les banques et les compagnies d’assurance vie. Il y a aussi la BMO dans vos choix. Expliquez-moi pourquoi.
À mon avis, le choix de la BMO est vraiment pertinent dans le contexte de ses activités aux États-Unis. Ses activités aux États-Unis ont été durement touchées par des marges beaucoup plus faibles. Mais elle s’en est bien tirée. Mais les activités aux États-Unis, en particulier, conviendraient à la BMO.
Mais au-delà de ses activités aux États-Unis, ce que j’ai observé de la banque au cours des deux derniers trimestres, c’est un bénéfice avant impôts et avant provisions très solide. Au quatrième trimestre de 2020, la BMO a augmenté son bénéfice avant impôts et avant provisions de 7 %. Elle s’est classée au deuxième rang du groupe.
Et ce que ça illustre vraiment, c’est l’élan du modèle d’affaires et, surtout, le bon contrôle des dépenses. Parce que le contrôle des dépenses de la BMO aurait été l’un des meilleurs en 2020. Je pense que ça la prépare bien pour 2021.
Vous surpondérez les banques dans l’ensemble, mais vous n’avez pas vraiment de préférence sectorielle actuellement entre les banques et les assureurs. Pourquoi?
Eh bien, j’ai vraiment l’impression que si on accepte l’idée que la courbe des taux va s’accentuer, ça fera augmenter le revenu d’intérêts net, ce qui est avantageux pour les banques. Par contre, une accentuation de la courbe des taux et une hausse des taux à long terme sont également très pertinentes pour les assureurs canadiens. Et les titres de sociétés comme Manuvie se négocient toujours à un cours inférieur à leur valeur comptable. Dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, des sociétés comme Manuvie, Industrielle Alliance, devraient peut-être aussi être avantagées. En fait, ce que j’essaie d’illustrer, c’est que cette tendance à une hausse des taux sur 10 ans ne s’applique pas seulement aux banques canadiennes, mais aussi aux assureurs canadiens.
Permettez-moi de vous demander quelque chose que beaucoup de gens surveillent actuellement : les réserves de capital des banques. Je sais que pour certaines banques, les ratios de fonds propres de catégorie 1 sous forme d’actions ordinaires n’ont jamais été aussi élevés, mais, bien sûr, elles ne peuvent rien en faire actuellement à cause des organismes de réglementation. Comment pensez-vous que ça pourrait se produire? Est-ce qu’elles vont attendre que les organismes de réglementation leur offrent certaines options, ou pensez-vous qu’elles vont devoir effectuer certaines acquisitions en cours de route?
Eh bien, si vous m’aviez dit que les ratios de capital seraient plus élevés à la fin de l’année qu’au début de l’année, compte tenu de tout ce qui s’est passé avec la pandémie, j’aurais été surpris, mais c’est ce qui s’est produit. Les ratios de capital sont passés de 11,7 % à 12,3 % au début de l’année. C’est une nette amélioration du ratio de capital.
Si vous me le permettez, j’ajouterai que le minimum approprié ou pratique, disons, est de 11 %, alors les banques, à 12,3 %, disposent actuellement de 28 milliards de dollars en capital excédentaire. Et si elles ne rachètent pas d’actions, si elles n’effectuent pas d’acquisitions et si elles n’augmentent pas leurs dividendes, d’ici la fin de l’année, elles pourraient avoir accumulé 36 ou 37 milliards de dollars de capital excédentaire. Dans la note, j’ai parlé de ce qui se produirait si toutes les banques rehaussaient leurs dividendes de 15 % aujourd’hui. Tout ce que ça ferait, c’est que ces 37 milliards de dollars à la fin de l’année que je prévois retomberaient à 36 milliards de dollars. Une hausse de 15 % des dividendes ne retire qu’un milliard de dollars des actions ordinaires, ce qui est négligeable dans le contexte d’un tel montant.
Je pense donc que les banques devraient augmenter leurs dividendes dès maintenant. Mais elles ne sont pas autorisées à le faire. Les organismes de réglementation ne le permettent pas actuellement. Mais selon une suite logique d’événements, à un moment donné au milieu de l’année, le BSIF permettrait aux banques d’augmenter leurs dividendes, et, vers la fin de l’année, de racheter des actions et de procéder à des acquisitions un peu plus énergiques. À l’heure actuelle, le défi de procéder à des acquisitions, c’est de ne pas savoir ce que l’on achète, de ne pas connaître les difficultés que ça peut amener dans un tel contexte. Mais je crois que les banques vont retrouver une souplesse financière, vers la fin de l’année.
C’est une période intéressante. Mario, j’aimerais terminer avec la question que je vous pose toujours : qu’est-ce que je devrais vous demander que je n’ai pas fait? Intéressant! J’ai donc commencé en disant que le crédit ne passerait pas à l’histoire en 2021. Où est-ce que je pourrais me tromper? Si je me trompe en ce qui concerne le crédit, qu’est-ce qui pourrait m’amener à me tromper? C’est une chose que je me demande souvent.
Et qu’est-ce que ça pourrait être?
Oui. En fin de compte, je crois vraiment que le consommateur canadien, une fois que l’aide qu’il reçoit, disons, du gouvernement, c’est-à-dire l’aide gouvernementale, et le soutien du gouvernement, lorsque tout ça prendra fin, il sera en mesure de bien fonctionner de nouveau. Le taux de chômage va revenir à la normale et les consommateurs pourront fonctionner normalement.
Le risque, bien sûr, c’est que ce vaccin ne soit pas aussi efficace qu’on l’espérait, qu’il y ait un autre confinement, que le chômage demeure très élevé et que les pertes sur créances soient encore plus élevées que ce que j’avais prévu. Je ne m’attends pas à ce que ça se produise, mais c’est une chose à laquelle je pensais beaucoup quand j’écrivais cette note. Est-ce que je pourrais me tromper à propos du crédit?
Mario, c’est toujours un plaisir. Merci beaucoup.
Merci.
[MUSIQUE]
Eh bien, les banques ont toutes surpassé les chiffres consensuels et mes chiffres, mes estimations, d’un montant très élevé. Je crois que dans le cas de la BMO, ça atteint un pourcentage aussi élevé que 26 %. Et ce qu’on a observé au cours du trimestre, c’est que les pertes sur créances ont été extrêmement faibles... 27 points de base de pertes sur créances douteuses au cours du trimestre. Cela se compare à ce qui serait plus normal pour les banques... soit environ 40. Ce qui leur a vraiment profité durant le trimestre, c’est toute l’aide gouvernementale et les reports de paiement que les banques ont établis. Et donc, on s’attend vraiment à ce que les pertes sur créances augmentent en 2021. Et pour cette raison, j’ai considéré que les bénéfices réels du trimestre n’avaient pas une grande valeur prédictive.
Parlons un peu de ce qui pourrait avoir une plus grande valeur prédictive. Tout au long de votre note, vous avez beaucoup insisté sur la composition des activités, l’importance des sources de revenus et des bénéfices des banques et les différences entre elles. Pour commencer, ce que nous avons vu pendant toute l’année 2020, c’est que les banques qui se sont bien comportées avaient une meilleure composition des activités dans ce contexte, et c’était le contraire pour les banques qui n’avaient pas une telle composition. Vous pourriez peut-être nous expliquer ce que vous entendez par « composition des activités ».
Oui. En 2020, la composition des activités a eu plus d’importance qu’à peu près toutes les autres années auxquelles je peux penser. Et il y avait plusieurs façons d’examiner la composition des activités. Dans un cas, les banques qui sont très axées sur les marchés des capitaux, pensez à la Banque Nationale, à la Banque Royale, ces banques-là, qui sont très axées sur les marchés des capitaux, ont été avantagées, avec la hausse de 30 % des revenus tirés des marchés des capitaux sur 12 mois, en particulier les solides résultats commerciaux. Et les banques qui étaient plus axées sur les services de détail, pensez à la Banque Scotia, peut-être aussi à la CIBC, les banques qui étaient plus exposées au revenu d’intérêts net n’ont pas eu un aussi bon rendement, parce que les taux d’intérêt étaient plus bas, ce qui a fait baisser les intérêts nets.
Mais aussi les banques qui mettent vraiment l’accent sur les activités des clients. Pensez aux achats par carte de crédit, aux frais de dépôt, aux frais de paiement et aux revenus d’assurance. Les banques très axées sur les services de détail ont souffert du confinement, parce que les activités des clients ont fortement ralenti. Je considère donc la composition des activités comme un véritable facteur de différenciation en 2020.
D’accord, et qu’est-ce que ça dit pour 2021? Qui est en bonne position pour ce qu’on espère, c’est-à-dire la reprise?
Si nous partons du principe que le crédit ne passera pas à l’histoire en 2021, que les pertes sur créances seront plus élevées... mais les banques ont déjà accumulé des réserves importantes pour faire face à cette situation. Donc, si on précise que le crédit ne battra pas de records, la composition des revenus, encore une fois, sera très importante. Et dans ce cas-ci, je vous dirais qu’il sera très difficile pour les banques d’avoir en 2021 une autre année comme celle que les marchés des capitaux ont connue en 2020.
En fait, en 2009, lorsque les marchés des capitaux étaient très solides, les revenus tirés de ces marchés ont diminué pendant deux années consécutives, en 2010 et en 2011. Et c’est ce que je m’attends à voir en 2021 : une baisse des revenus tirés des marchés des capitaux. Il y a deux banques qui profitent vraiment des marchés des capitaux, la Banque Royale et la Banque Nationale. La Banque Royale tire 20 % de ses revenus des marchés des capitaux, et la Banque Nationale, environ 26 %. Donc, à mesure que les marchés des capitaux vont reculer, que les revenus de négociation vont ralentir, ces deux banques pourraient se retrouver dans une position légèrement défavorable. Encore une fois, les banques qui se concentrent davantage sur les services de détail, pensez à la Banque Scotia, à la CIBC, ces banques-là sont beaucoup plus axées sur les services de détail, et leur modèle d’affaires pourrait être légèrement plus favorable.
Vous mentionnez également dans votre note que vous avez constaté un changement en faveur des banques les moins performantes en 2020, par exemple la BMO, la Banque Scotia, et qu’elles reprennent du poil de la bête grâce aux évaluations boursières qui ont augmenté, je suppose.
Je crois que oui. Il y a un argument de base selon lequel, si vous achetez des actions qui ont été à la traîne au cours d’une année, elles sont plus susceptibles de rattraper l’écart d’évaluation au cours de l’année suivante. Et c’est une opération légitime que j’ai vu les investisseurs faire au fil du temps. Mais je pense qu’il se passe peut-être autre chose aussi, en particulier dans le cas de la Banque Scotia, qui a été durement touchée par les mesures de confinement dans son segment international. Les données fondamentales jouent donc aussi un rôle.
Parlons un peu de la Banque Scotia. Parlez-nous un peu plus de ce qui s’est passé avec cette banque.
Eh bien, au cours de l’été, les mesures de confinement se sont un peu atténuées en Amérique du Nord, surtout parce que c’était l’été et que le nombre de cas avait commencé à diminuer. Bien sûr, en Amérique latine, c’était l’hiver, et l’augmentation des cas s’est accélérée à un moment où les nôtres diminuaient. Et les mesures de confinement dans les pays comme le Pérou, le Chili et la Colombie étaient beaucoup plus strictes que celles en Amérique du Nord. J’ai entendu parler de l’armée qui arpentait les rues de Lima, au Pérou, en veillant à ce que les gens ne quittent pas leur domicile.
En raison de ce genre de confinement, la Banque Scotia a vu ses revenus de frais, ses frais de carte de crédit, ses frais de dépôt, ses frais de paiement et ses frais d’assurance diminuer considérablement. Ça a eu un très gros impact sur la Banque Scotia. Ce qui joue en quelque sorte en faveur de la Banque Scotia en ce moment, c’est qu’à l’approche de notre hiver, l’Amérique latine se dirige vers son été, donc les mesures de confinement prennent fin alors que les nôtres prennent de l’ampleur, en quelque sorte. Mais ce qui pourrait vraiment favoriser le commerce international au sortir de ces mesures de confinement, c’est que leur hiver va commencer en mai, mais d’ici là, je suppose que l’Amérique latine aura eu le temps de distribuer le vaccin. Ils n’auront donc peut-être pas à procéder à un confinement rigoureux durant leurs mois d’hiver, qui commencerait en mai 2021.
Donc, les activités internationales de la Banque Scotia, qui ont été très défavorables en 2020, pourraient en fait gagner du terrain en 2021. La Banque Scotia est l’un de vos meilleurs choix parmi les banques et les compagnies d’assurance vie. Il y a aussi la BMO dans vos choix. Expliquez-moi pourquoi.
À mon avis, le choix de la BMO est vraiment pertinent dans le contexte de ses activités aux États-Unis. Ses activités aux États-Unis ont été durement touchées par des marges beaucoup plus faibles. Mais elle s’en est bien tirée. Mais les activités aux États-Unis, en particulier, conviendraient à la BMO.
Mais au-delà de ses activités aux États-Unis, ce que j’ai observé de la banque au cours des deux derniers trimestres, c’est un bénéfice avant impôts et avant provisions très solide. Au quatrième trimestre de 2020, la BMO a augmenté son bénéfice avant impôts et avant provisions de 7 %. Elle s’est classée au deuxième rang du groupe.
Et ce que ça illustre vraiment, c’est l’élan du modèle d’affaires et, surtout, le bon contrôle des dépenses. Parce que le contrôle des dépenses de la BMO aurait été l’un des meilleurs en 2020. Je pense que ça la prépare bien pour 2021.
Vous surpondérez les banques dans l’ensemble, mais vous n’avez pas vraiment de préférence sectorielle actuellement entre les banques et les assureurs. Pourquoi?
Eh bien, j’ai vraiment l’impression que si on accepte l’idée que la courbe des taux va s’accentuer, ça fera augmenter le revenu d’intérêts net, ce qui est avantageux pour les banques. Par contre, une accentuation de la courbe des taux et une hausse des taux à long terme sont également très pertinentes pour les assureurs canadiens. Et les titres de sociétés comme Manuvie se négocient toujours à un cours inférieur à leur valeur comptable. Dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, des sociétés comme Manuvie, Industrielle Alliance, devraient peut-être aussi être avantagées. En fait, ce que j’essaie d’illustrer, c’est que cette tendance à une hausse des taux sur 10 ans ne s’applique pas seulement aux banques canadiennes, mais aussi aux assureurs canadiens.
Permettez-moi de vous demander quelque chose que beaucoup de gens surveillent actuellement : les réserves de capital des banques. Je sais que pour certaines banques, les ratios de fonds propres de catégorie 1 sous forme d’actions ordinaires n’ont jamais été aussi élevés, mais, bien sûr, elles ne peuvent rien en faire actuellement à cause des organismes de réglementation. Comment pensez-vous que ça pourrait se produire? Est-ce qu’elles vont attendre que les organismes de réglementation leur offrent certaines options, ou pensez-vous qu’elles vont devoir effectuer certaines acquisitions en cours de route?
Eh bien, si vous m’aviez dit que les ratios de capital seraient plus élevés à la fin de l’année qu’au début de l’année, compte tenu de tout ce qui s’est passé avec la pandémie, j’aurais été surpris, mais c’est ce qui s’est produit. Les ratios de capital sont passés de 11,7 % à 12,3 % au début de l’année. C’est une nette amélioration du ratio de capital.
Si vous me le permettez, j’ajouterai que le minimum approprié ou pratique, disons, est de 11 %, alors les banques, à 12,3 %, disposent actuellement de 28 milliards de dollars en capital excédentaire. Et si elles ne rachètent pas d’actions, si elles n’effectuent pas d’acquisitions et si elles n’augmentent pas leurs dividendes, d’ici la fin de l’année, elles pourraient avoir accumulé 36 ou 37 milliards de dollars de capital excédentaire. Dans la note, j’ai parlé de ce qui se produirait si toutes les banques rehaussaient leurs dividendes de 15 % aujourd’hui. Tout ce que ça ferait, c’est que ces 37 milliards de dollars à la fin de l’année que je prévois retomberaient à 36 milliards de dollars. Une hausse de 15 % des dividendes ne retire qu’un milliard de dollars des actions ordinaires, ce qui est négligeable dans le contexte d’un tel montant.
Je pense donc que les banques devraient augmenter leurs dividendes dès maintenant. Mais elles ne sont pas autorisées à le faire. Les organismes de réglementation ne le permettent pas actuellement. Mais selon une suite logique d’événements, à un moment donné au milieu de l’année, le BSIF permettrait aux banques d’augmenter leurs dividendes, et, vers la fin de l’année, de racheter des actions et de procéder à des acquisitions un peu plus énergiques. À l’heure actuelle, le défi de procéder à des acquisitions, c’est de ne pas savoir ce que l’on achète, de ne pas connaître les difficultés que ça peut amener dans un tel contexte. Mais je crois que les banques vont retrouver une souplesse financière, vers la fin de l’année.
C’est une période intéressante. Mario, j’aimerais terminer avec la question que je vous pose toujours : qu’est-ce que je devrais vous demander que je n’ai pas fait? Intéressant! J’ai donc commencé en disant que le crédit ne passerait pas à l’histoire en 2021. Où est-ce que je pourrais me tromper? Si je me trompe en ce qui concerne le crédit, qu’est-ce qui pourrait m’amener à me tromper? C’est une chose que je me demande souvent.
Et qu’est-ce que ça pourrait être?
Oui. En fin de compte, je crois vraiment que le consommateur canadien, une fois que l’aide qu’il reçoit, disons, du gouvernement, c’est-à-dire l’aide gouvernementale, et le soutien du gouvernement, lorsque tout ça prendra fin, il sera en mesure de bien fonctionner de nouveau. Le taux de chômage va revenir à la normale et les consommateurs pourront fonctionner normalement.
Le risque, bien sûr, c’est que ce vaccin ne soit pas aussi efficace qu’on l’espérait, qu’il y ait un autre confinement, que le chômage demeure très élevé et que les pertes sur créances soient encore plus élevées que ce que j’avais prévu. Je ne m’attends pas à ce que ça se produise, mais c’est une chose à laquelle je pensais beaucoup quand j’écrivais cette note. Est-ce que je pourrais me tromper à propos du crédit?
Mario, c’est toujours un plaisir. Merci beaucoup.
Merci.
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