
Les banques américaines ont présenté de meilleurs résultats au troisième trimestre qu’au trimestre précédent, mais restent à la traîne par rapport à l’indice S&P 500. Y a-t-il des signes que les choses vont changer? James Hunter, cogestionnaire de portefeuille, Gestion de Placements TD, discute des plus récents résultats et des perspectives du secteur.
Je suis accompagné de James Hunter, cogestionnaire de portefeuille et vice-président, Gestion de Placements TD. James, avant d’entrer dans les résultats trimestriels les plus récents, pourquoi les banques américaines se sont-elles si mal comportées par rapport à l’ensemble du marché?
Oui, Anthony, l’année a été difficile pour les banques. Les actions ont reculé de 35 % jusqu’à maintenant. On le voit dans la ligne verte du graphique que j’ai apporté, et c’est loin derrière l’ensemble du marché.
Et j’imagine que je devrais aborder la discussion en tenant compte du contexte macroéconomique et des données fondamentales. La pandémie mondiale nous a plongés dans une récession vraiment profonde cette année. Et c’est tout simplement un mauvais environnement pour les actions des banques. Si on y pense, le chômage augmente, les entreprises éprouvent des difficultés et les taux d’intérêt diminuent, ce qui réduit le revenu d’intérêts net que les banques tirent de leurs prêts.
Un autre facteur, c’est que les élections américaines vont avoir lieu dans quelques semaines. Et il y a de bonnes chances que le résultat débouche sur des politiques comme une hausse des impôts ou de la réglementation pour les sociétés. Ce serait également mauvais pour les banques. Et ça ébranle la confiance.
Enfin, il y a les données fondamentales, comme vous l’avez mentionné. Les bénéfices sont en baisse de 50 % cette année par rapport à l’an dernier. Et cela est attribuable au ralentissement de la croissance des prêts, à la baisse des marges et à la hausse des provisions pour pertes sur créances. Tous ces facteurs réunis ont fait en sorte qu’il était vraiment impossible pour les banques de suivre le rythme des grandes sociétés technologiques qui font grimper le marché.
D’accord, donc compte tenu de ce contexte, que pensez-vous des derniers résultats?
Dans l’ensemble, je dirais que le troisième trimestre a été difficile. Si on regarde le deuxième graphique que j’ai apporté, on voit le revenu net cumulatif des quatre grandes banques. Au troisième trimestre, il s’élevait à 18,8 milliards de dollars. C’est une très bonne augmentation entre le premier et le deuxième trimestre, en raison de la baisse des provisions. Mais il reste en baisse de 20 % sur 12 mois.
Et si on pense aux services bancaires aux consommateurs traditionnels, ils ont du mal à composer avec ces marges inférieures, qui ont baissé d’environ 15 points de base par rapport au dernier trimestre. Ça peut sembler peu. Mais c’est un chiffre vraiment important. Et puis il y a les marchés de la gestion de patrimoine et des capitaux, qui ne peuvent tout simplement pas combler la différence. Même si les résultats ont été légèrement supérieurs aux attentes, les tendances sous-jacentes n’étaient tout simplement pas suffisantes.
Avez-vous remarqué des points positifs au troisième trimestre, ainsi que dans les perspectives pour l’année prochaine?
Oui, c’est une bonne question. Et je suppose que le point dont nous n’avons pas encore parlé, c’est le capital. Si on regarde le ratio de fonds propres de catégorie 1 sous forme d’actions ordinaires des grandes banques à la fin du trimestre, il était de 12 %.
JP Morgan a en fait augmenté de 13 %. Ces chiffres sont vraiment énormes.
Et ça montre qu’il y a environ 100 milliards de dollars de capital excédentaire par rapport aux minimums réglementaires. Et ça devrait donner aux investisseurs l’assurance que les banques seront en mesure de surmonter les obstacles qui les attendent à l’avenir, du point de vue du capital.
Pour ce qui est des perspectives, on s’attend à ce que les dépenses par carte de crédit augmentent au cours des prochains trimestres, et le revenu d’intérêts net a probablement atteint un creux au troisième trimestre. Ça donnerait aux banques un bon cadre pour l’année prochaine, car le revenu d’intérêts net représente habituellement de 50 % à 60 % des revenus des banques. Ce sont donc quelques-unes des lueurs d’espoir dans ces sombres perspectives.
D’accord, et la grande question maintenant est de savoir ce qu’il en est des évaluations. Est-ce qu’elles sont bon marché en ce moment, et est-ce que vous entrevoyez une certaine amélioration au cours des prochains mois?
Oui, donc ça dépend un peu de la mesure que vous examinez. À l’heure actuelle, les titres des banques sont inférieurs d’environ 20 % à leur valeur comptable. Historiquement, c’est un niveau intéressant. Mais je prônerais la priorité sur les bénéfices et les dividendes.
Sur cette base, notre titre se négocie à environ 11,5 fois nos bénéfices prévisionnels, ce qui représente un rendement en dividende d’environ 3,25 %. C’est un peu intéressant, mais ce n’est pas un achat incontournable. Et je pense que pour que les évaluations augmentent, il faut que les résultats s’améliorent et qu’ils soient constants. Honnêtement, ça aiderait aussi que la Réserve fédérale américaine autorise des hausses de dividendes, car ça nous permettrait d’obtenir une combinaison vraiment intéressante de rendement en dividende et de croissance des dividendes.
En somme, qu’est-ce que les investisseurs devraient garder à l’esprit à l’avenir?
Eh bien, je pense que les investisseurs devraient se rappeler qu’à un moment donné, nous aurons une solution sanitaire à cette crise sanitaire. À la différence de la crise financière mondiale, nous pouvons avoir l’assurance que les banques vont s’en sortir. Il n’y a donc pas lieu de paniquer.
Mais quand je pense à la façon dont les actions progressent de façon significative et à l’amélioration de la confiance, je pense que ça se résume à de meilleurs résultats. Et ça voudrait dire une croissance plus rapide des prêts, une augmentation des marges et une diminution des dépenses. Et je crains que, pour surpasser l’ensemble du marché, les trois soient nécessaires.
Et c’est un peu difficile de voir comment tout ça va se concrétiser dans un contexte où les taux d’intérêt sont plus bas et où il est possible que les impôts et la réglementation augmentent. Donc pour l’instant, on reste prudents à l’égard des banques américaines.
James, merci beaucoup pour votre temps.
Merci beaucoup, Anthony.
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