
Alors que le monde fait face à la crise mondiale causée par la COVID-19, la course au vaccin a mis en lumière le secteur des soins de santé. Anthony Okolie et Tarik Aeta, analyste du secteur des soins de santé, Gestion de Placements TD, discutent des répercussions à long terme de la pandémie sur le secteur des soins de santé.
Print Transcript
Tarik, commençons par une vue d’ensemble. Comment le secteur des soins de santé s’est-il comporté durant la COVID-19 du point de vue des investisseurs?
Oui. Si je devais n’utiliser qu’un seul mot pour décrire le rendement des entreprises du secteur des soins de santé pendant la COVID-19, ce serait « résilient ». Et pour le montrer, j’ai apporté un graphique aujourd’hui. Ce graphique montre à quel point chaque secteur de l’indice S&P 500 devrait augmenter ses bénéfices cette année.
Comme vous pouvez le constater, tout comme lors des récessions précédentes, le secteur des soins de santé a été fidèle à sa réputation en se montrant assez défensif. En fait, les bénéfices du secteur devraient augmenter d’un peu plus de 2 % cette année, de manière comparable aux technologies, mais bien au-delà de la baisse prévue de 20 % des bénéfices du S&P 500 cette année, qui ont été freinés par les entreprises des secteurs de l’énergie, des produits industriels et des services financiers.
Et bien sûr, l’une des grandes questions que les gens se posent, c’est : où en sommes-nous dans la course au vaccin?
Oui. Il n’y a donc pas eu beaucoup de changements au cours du dernier mois, depuis la dernière fois où nous nous sommes parlé. Les trois sociétés qui mènent cette course devraient publier leurs résultats de la phase 3 plus tard cette année. On parle ici de Moderna, AstraZeneca et Pfizer BioNTech. BioNTech s’attend à obtenir les résultats de la phase 3 dès la fin d’octobre. Et si les résultats sont positifs, et si les données le prouvent, l’approbation réglementaire pourrait être donnée plus tard cet automne.
Cela dit, il est important de souligner que les vaccins seront limités au début. Et il est peu probable que la FDA approuve le vaccin pour les personnes à faible risque jusqu’à ce que nous ayons au moins six mois de données. Il est donc peu probable que le grand public ait un accès généralisé au vaccin avant le deuxième semestre de l’année prochaine.
Parlez-moi des gagnants et des perdants jusqu’à maintenant dans le secteur des soins de santé.
Oui. L’un des secteurs qui a le plus bénéficié de la pandémie de COVID a été le secteur des diagnostics et des outils des sciences de la vie. Sur le plan des diagnostics, nous avons les entreprises qui fabriquent les tests de COVID-19, et ceux-ci vont demeurer très en demande tout au long de 2021.
Du côté des outils des sciences de la vie, il y a les entreprises qui fabriquent tout le matériel nécessaire à la conception des vaccins, des réservoirs géants de bioréacteur jusqu’aux matières premières. Par exemple, Thermo Fisher Scientific, la plus grande entreprise du secteur, profite de deux facteurs favorables. Non seulement elle fabrique plus de 10 millions de tests de COVID chaque semaine, mais en plus de ça, elle travaille avec ses clients du secteur pharmaceutique dans le cadre de plus de 250 projets pour produire des traitements et des vaccins contre la COVID-19.
Pour ce qui est des perdants, le secteur des appareils médicaux a été durement touché par la pandémie. Ce sont des entreprises qui fabriquent des appareils implantables, comme des stimulateurs cardiaques, des hanches et des genoux artificiels et des valves cardiaques, pour n’en nommer que quelques-uns. Et on s’attend à ce que leurs bénéfices diminuent de 16 % cette année. Et c’est parce que lorsque la pandémie a commencé, la plupart des hôpitaux ont annulé les chirurgies électives pour faire de la place aux patients atteints de la COVID-19.
En fait, ici en Ontario, l’arriéré de chirurgies électives attribuable à la COVID-19 est estimé à environ 84 semaines, et environ 150 000 procédures ont été retardées dans cette seule province. Cela dit, même si, de toute évidence, c’est négatif pour le secteur à court terme, je ne suis pas trop préoccupé, car ces procédures ont simplement été reportées à plus tard plutôt que d’être carrément annulées.
Donc, à l’approche de l’année prochaine, non seulement je m’attends à ce que les ventes du secteur reviennent à leurs niveaux d’avant la pandémie, mais elles pourraient même dépasser les prévisions, à mesure qu’on élimine cet énorme arriéré.
D’accord. Compte tenu de toutes ces variables, comment les sociétés pharmaceutiques et biotechnologiques se sont-elles comportées durant la COVID-19? Pensez-vous qu’il y aura un vaccin, quelque chose pour stimuler l’industrie?
Oui. Dans l’ensemble, les bénéfices des sociétés pharmaceutiques ont été relativement stables. Et c’est logique, car la plupart des médicaments sont destinés aux maladies chroniques. Les ventes du secteur ont donc été assez constantes tout au long de la pandémie. Pour ce qui est de l’importance qu’un vaccin contre la COVID-19 pourrait avoir pour l’industrie, il est encore trop tôt pour le dire.
Il y a plusieurs raisons à ça. Tout d’abord, avec plus de 180 vaccins en développement, le marché des vaccins sera très concurrentiel. Deuxièmement, beaucoup de ces vaccins-là sont vendus au prix coûtant, y compris les vaccins d’AstraZeneca et de Johnson & Johnson. Cela pourrait maintenir les prix bas dans l’ensemble de l’industrie.
Et troisièmement, nous ne savons pas à quel point ces vaccins sont durables. Si ces vaccins ne durent qu’un an, le marché des vaccins pourrait finir par être assez important, car nous aurions besoin d’un rappel annuel. Cela dit, si les vaccins se révèlent être durables, les possibilités de mise en marché de vaccins risquent d’être beaucoup moins importantes que ce que beaucoup prévoient.
D’accord. Compte tenu de toutes ces possibilités, quelles sont vos perspectives à long terme pour le secteur?
Oui. En prenant du recul et en examinant la situation dans son ensemble, la COVID ne change pas fondamentalement les perspectives du secteur. Et c’est parce que le secteur des soins de santé profite en fait de deux facteurs favorables présents depuis plusieurs décennies. Tout d’abord, il y a la croissance et le vieillissement continus de la population mondiale, et ça ne changera pas de sitôt.
Le deuxième moteur de croissance, qui est sans doute encore plus important, c’est l’innovation continue. Et c’est cette innovation qui continue d’élargir ce qui est possible dans le domaine des soins de santé, de la chirurgie robotisée jusqu’aux nouveaux médicaments contre le cancer. Donc, comme le secteur dépense plus d’un quart de billion de dollars chaque année, à l’échelle mondiale, en recherche et développement, l’innovation va demeurer robuste dans un avenir prévisible.
D’accord. Il y a donc certainement des occasions dans ce contexte-là. Parlez-nous des difficultés pour ce secteur.
Oui. À l’approche des élections de novembre 2020, la possibilité d’une réforme du prix des médicaments aux États-Unis est un sujet de préoccupation. C’est parce que les démocrates et les républicains ont proposé de donner au gouvernement américain le pouvoir de négocier directement les prix des médicaments ou d’indexer les prix des médicaments aux prix payés par d’autres pays développés, comme le Canada.
Bien que cette situation soit clairement défavorable pour le secteur des produits pharmaceutiques et biotechnologiques, de nombreuses propositions semblables ont échoué dans le passé. Cela dit, la différence cette fois-ci, c’est que les deux partis appuient cet enjeu. C’est donc un risque qui, selon moi, mérite d’être surveillé au cours des prochains mois.
Il y aura certainement des aspects intéressants à surveiller. Tarik, merci beaucoup du temps que vous nous avez accordé.
Merci, Anthony.
[MUSIQUE]
Oui. Si je devais n’utiliser qu’un seul mot pour décrire le rendement des entreprises du secteur des soins de santé pendant la COVID-19, ce serait « résilient ». Et pour le montrer, j’ai apporté un graphique aujourd’hui. Ce graphique montre à quel point chaque secteur de l’indice S&P 500 devrait augmenter ses bénéfices cette année.
Comme vous pouvez le constater, tout comme lors des récessions précédentes, le secteur des soins de santé a été fidèle à sa réputation en se montrant assez défensif. En fait, les bénéfices du secteur devraient augmenter d’un peu plus de 2 % cette année, de manière comparable aux technologies, mais bien au-delà de la baisse prévue de 20 % des bénéfices du S&P 500 cette année, qui ont été freinés par les entreprises des secteurs de l’énergie, des produits industriels et des services financiers.
Et bien sûr, l’une des grandes questions que les gens se posent, c’est : où en sommes-nous dans la course au vaccin?
Oui. Il n’y a donc pas eu beaucoup de changements au cours du dernier mois, depuis la dernière fois où nous nous sommes parlé. Les trois sociétés qui mènent cette course devraient publier leurs résultats de la phase 3 plus tard cette année. On parle ici de Moderna, AstraZeneca et Pfizer BioNTech. BioNTech s’attend à obtenir les résultats de la phase 3 dès la fin d’octobre. Et si les résultats sont positifs, et si les données le prouvent, l’approbation réglementaire pourrait être donnée plus tard cet automne.
Cela dit, il est important de souligner que les vaccins seront limités au début. Et il est peu probable que la FDA approuve le vaccin pour les personnes à faible risque jusqu’à ce que nous ayons au moins six mois de données. Il est donc peu probable que le grand public ait un accès généralisé au vaccin avant le deuxième semestre de l’année prochaine.
Parlez-moi des gagnants et des perdants jusqu’à maintenant dans le secteur des soins de santé.
Oui. L’un des secteurs qui a le plus bénéficié de la pandémie de COVID a été le secteur des diagnostics et des outils des sciences de la vie. Sur le plan des diagnostics, nous avons les entreprises qui fabriquent les tests de COVID-19, et ceux-ci vont demeurer très en demande tout au long de 2021.
Du côté des outils des sciences de la vie, il y a les entreprises qui fabriquent tout le matériel nécessaire à la conception des vaccins, des réservoirs géants de bioréacteur jusqu’aux matières premières. Par exemple, Thermo Fisher Scientific, la plus grande entreprise du secteur, profite de deux facteurs favorables. Non seulement elle fabrique plus de 10 millions de tests de COVID chaque semaine, mais en plus de ça, elle travaille avec ses clients du secteur pharmaceutique dans le cadre de plus de 250 projets pour produire des traitements et des vaccins contre la COVID-19.
Pour ce qui est des perdants, le secteur des appareils médicaux a été durement touché par la pandémie. Ce sont des entreprises qui fabriquent des appareils implantables, comme des stimulateurs cardiaques, des hanches et des genoux artificiels et des valves cardiaques, pour n’en nommer que quelques-uns. Et on s’attend à ce que leurs bénéfices diminuent de 16 % cette année. Et c’est parce que lorsque la pandémie a commencé, la plupart des hôpitaux ont annulé les chirurgies électives pour faire de la place aux patients atteints de la COVID-19.
En fait, ici en Ontario, l’arriéré de chirurgies électives attribuable à la COVID-19 est estimé à environ 84 semaines, et environ 150 000 procédures ont été retardées dans cette seule province. Cela dit, même si, de toute évidence, c’est négatif pour le secteur à court terme, je ne suis pas trop préoccupé, car ces procédures ont simplement été reportées à plus tard plutôt que d’être carrément annulées.
Donc, à l’approche de l’année prochaine, non seulement je m’attends à ce que les ventes du secteur reviennent à leurs niveaux d’avant la pandémie, mais elles pourraient même dépasser les prévisions, à mesure qu’on élimine cet énorme arriéré.
D’accord. Compte tenu de toutes ces variables, comment les sociétés pharmaceutiques et biotechnologiques se sont-elles comportées durant la COVID-19? Pensez-vous qu’il y aura un vaccin, quelque chose pour stimuler l’industrie?
Oui. Dans l’ensemble, les bénéfices des sociétés pharmaceutiques ont été relativement stables. Et c’est logique, car la plupart des médicaments sont destinés aux maladies chroniques. Les ventes du secteur ont donc été assez constantes tout au long de la pandémie. Pour ce qui est de l’importance qu’un vaccin contre la COVID-19 pourrait avoir pour l’industrie, il est encore trop tôt pour le dire.
Il y a plusieurs raisons à ça. Tout d’abord, avec plus de 180 vaccins en développement, le marché des vaccins sera très concurrentiel. Deuxièmement, beaucoup de ces vaccins-là sont vendus au prix coûtant, y compris les vaccins d’AstraZeneca et de Johnson & Johnson. Cela pourrait maintenir les prix bas dans l’ensemble de l’industrie.
Et troisièmement, nous ne savons pas à quel point ces vaccins sont durables. Si ces vaccins ne durent qu’un an, le marché des vaccins pourrait finir par être assez important, car nous aurions besoin d’un rappel annuel. Cela dit, si les vaccins se révèlent être durables, les possibilités de mise en marché de vaccins risquent d’être beaucoup moins importantes que ce que beaucoup prévoient.
D’accord. Compte tenu de toutes ces possibilités, quelles sont vos perspectives à long terme pour le secteur?
Oui. En prenant du recul et en examinant la situation dans son ensemble, la COVID ne change pas fondamentalement les perspectives du secteur. Et c’est parce que le secteur des soins de santé profite en fait de deux facteurs favorables présents depuis plusieurs décennies. Tout d’abord, il y a la croissance et le vieillissement continus de la population mondiale, et ça ne changera pas de sitôt.
Le deuxième moteur de croissance, qui est sans doute encore plus important, c’est l’innovation continue. Et c’est cette innovation qui continue d’élargir ce qui est possible dans le domaine des soins de santé, de la chirurgie robotisée jusqu’aux nouveaux médicaments contre le cancer. Donc, comme le secteur dépense plus d’un quart de billion de dollars chaque année, à l’échelle mondiale, en recherche et développement, l’innovation va demeurer robuste dans un avenir prévisible.
D’accord. Il y a donc certainement des occasions dans ce contexte-là. Parlez-nous des difficultés pour ce secteur.
Oui. À l’approche des élections de novembre 2020, la possibilité d’une réforme du prix des médicaments aux États-Unis est un sujet de préoccupation. C’est parce que les démocrates et les républicains ont proposé de donner au gouvernement américain le pouvoir de négocier directement les prix des médicaments ou d’indexer les prix des médicaments aux prix payés par d’autres pays développés, comme le Canada.
Bien que cette situation soit clairement défavorable pour le secteur des produits pharmaceutiques et biotechnologiques, de nombreuses propositions semblables ont échoué dans le passé. Cela dit, la différence cette fois-ci, c’est que les deux partis appuient cet enjeu. C’est donc un risque qui, selon moi, mérite d’être surveillé au cours des prochains mois.
Il y aura certainement des aspects intéressants à surveiller. Tarik, merci beaucoup du temps que vous nous avez accordé.
Merci, Anthony.
[MUSIQUE]