
Anthony Okolie récapitule l’actualité du jour, notamment les dernières nouvelles sur la COVID-19, puis Kim Parlee et Beata Caranci, économiste en chef, Groupe Banque TD, discutent de l’impact de la COVID-19 sur les économies mondiales, de la trajectoire de la reprise et des répercussions sur la génération Y.
Print Transcript
Bonjour et bienvenue au bulletin quotidien COVID-19 MoneyTalk du mercredi 6 mai. Ici, Anthony Okolie. Dans quelques minutes, Kim Parlee parlera des répercussions mondiales de la pandémie de COVID-19 sur l’économie avec Beata Caranci, économiste en chef, Groupe Banque TD. Commençons cependant en faisant un survol rapide des nouvelles du jour.
Le marché de l’emploi américain continue de souffrir du coronavirus. Le dernier rapport d’ADP montre que les emplois dans le secteur privé ont chuté de plus de 20 millions en avril. Il s’agit de la pire perte d’emploi enregistrée depuis que le rapport existe.
Les mauvaises nouvelles économiques se succèdent : l’Union européenne prévoit une contraction de 7,4 % de l’économie de la région cette année en raison de la COVID-19, ce qui représenterait le pire choc économique depuis la Grande Dépression.
Sur le plan des bénéfices, Shopify a annoncé un bénéfice trimestriel inattendu et des ventes plus élevées, les utilisateurs ayant visité la plateforme en plus grand nombre après que les mesures de confinement aient forcé les commerçants à déplacer leurs activités en ligne.
Le bénéfice de Disney, lui, a connu une chute vertigineuse de 91 % au cours des trois premiers mois de l’année, ce qui révèle toute l’ampleur des conséquences de la pandémie de coronavirus sur le Magic Kingdom.
Enfin, un restaurant néerlandais a trouvé une façon ingénieuse d’offrir des repas en plein air de qualité à l’ère du coronavirus : l’entreprise a construit des petites cabanes en verre qui, agissant comme un cocon intime, peuvent abriter deux ou trois personnes sur une terrasse publique.
Ça fait le tour des nouvelles du jour. Voici maintenant la discussion de Kim Parlee avec Beata Caranci.
Beata, le graphique qu’on vient de regarder montre que les économies avancées subissent des pressions beaucoup plus fortes que les économies émergentes en 2020, même si tout le monde est durement touché. Pourquoi?
Eh bien, d’une part, c’est que la Chine figure parmi les marchés émergents, et qu’elle a été touchée plus tôt que les économies avancées. Elle a déjà entamé sa reprise. Et la Chine occupe une grande part des marchés émergents.
Du côté des économies avancées, la plupart des arrêts conjoncturels ont eu lieu en mars, débordant jusqu’en avril et en mai. En fonction des données sur les PIB que nous obtenons, la situation est assez désastreuse dans ces régions. Les contractions au premier trimestre ont atteint 14 % pour la zone euro.
Aux États-Unis, elles se situent plutôt aux alentours de 5 %. On n’a pas encore les données pour le Canada, mais on s’attend à une contraction d’environ 10 %. Et ça, c’est pour le premier trimestre, ce qui ne correspond pas au creux de la récession.
Celui-ci a plutôt eu lieu en avril, ce qui nous amène au deuxième trimestre. Les pourcentages y tourneront fort probablement plus aux alentours de 40 %. Dans tout ça, il y a un facteur de temps, puis, de fonctionnement des cycles de reprise.
Est-ce qu’on pourrait approfondir la question entourant le PIB et les emplois au Canada et aux États-Unis? Vous avez parlé des premiers trimestres. Mais qu’est-ce qui se passera au-delà de cela, selon vous?
Eh bien, le rapport sur les emplois du mois d’avril va sortir vendredi, tant pour les États-Unis que le Canada, et ça devrait être l’un des pires rapports jamais observés avec les pertes d’emploi massives dont on a été témoin.
Nous savons qu’il y a eu 30 millions de demandes de prestations d’assurance-chômage aux États-Unis, et ça représente uniquement les demandes de prestations présentées... au cours d’une période de six semaines. C’est un taux de chômage incroyable élevé sur un court laps de temps.
Selon nous, les pertes d’emploi au Canada oscillent dans les trois à quatre millions juste pour le mois d’avril. Ça fait suite aux pertes d’emplois de mars, évaluées à environ un million.
On atteint donc le creux des statistiques en avril. Ce qui compte maintenant, à l’approche des mois de mai, juin et juillet, alors que les gouvernements ont annoncé des stratégies de réouverture, c’est de savoir quelle proportion de ces travailleurs retournera au travail, outre ceux visés par le programme de subvention salariales, au Canada; car on sait que ceux-ci seront rappelés par leur employeur.
La subvention couvre 75 % de leur revenu, et ce, même s’ils ne travaillent aucune heure. Ils sont donc liés à leur employeur, sans nécessairement cumuler des heures pour le moment, parce que l’employeur ne les utilise pas de façon productive.
Il faut se demander si, avec l’arrivée des mois d’été, ces travailleurs contribueront à l’exploitation des activités. Parce que ni le gouvernement ni leur employeur va pouvoir, essentiellement, couvrir cette période pendant très longtemps. Fondamentalement, on a jusqu’à l’été pour voir comment cette reprise se déroulera.
Je sais que vous avez parlé tantôt à un groupe de collègues à propos des effets à long terme qu’a eu le chômage par le passé. Pouvez-vous nous expliquer un peu plus en détail ce que ça signifie et signifiera, entre guillemets, sur le plan de la « relance de l’économie », parce que ça ne sera pas que noir ou blanc.
Oui. Les plans de reprise sont progressifs et longs. Ce que les données sur l’emploi de mars nous disent et, on verra si la situation se dégradera davantage en avril, c’est que les jeunes sont beaucoup plus durement touchés.
Par exemple, les jeunes de 15 à 24 ans ont enregistré 40 % des pertes d’emplois en mars. Ça équivaut à environ trois fois plus que leur représentation de la population active. C’est donc un pourcentage assez élevé. Bon nombre de ces pertes correspondent à des emplois à temps partiel, mais pas totalement.
Donc, ce qu’on sait, c’est qu’en période de récession-- et c’est là que la longévité compte vraiment si l’économie ne se remet pas sur la bonne voie-- la stigmatisation de ce segment de la population peut durer assez longtemps.
Il y a eu ce qu’on appelle des études longitudinales; elles suivent les gens au fil du temps, au fur et à mesure qu’ils vieillissent. Selon ces études et les récessions antérieures, il peut falloir de 10 à 15 ans pour revenir au potentiel de revenu que vous auriez eu si vous aviez obtenu votre diplôme dans un contexte économique plus favorable.
La chance compte donc sur le plan du moment où vous intégrez la population active. De toute évidence, les employeurs auront initialement trop d’employés en raison des réouvertures progressives prévues. Par conséquent, la population plus jeune pourrait ne pas avoir de nombreuses occasions de perfectionner leurs compétences.
Ce qu’on pourrait voir, au début de l’année prochaine et l’année suivante, ce sont des gens qui accepteront d’effectuer un boulot pour lequel ils sont surqualifiés. Ce qui se traduira par un taux plus élevé de sous-emploi.
Ce sera donc... au sein de cette génération que les cicatrices seront probablement les plus marquées. Même si on pense que les fortes contractions seront plutôt temporaires du côté de l’économie canadienne, la période de reprise et la stigmatisation pourraient durer assez longtemps.
De toute évidence, on observera cela partout, pas seulement au Canada. Si on regarde du côté des États-Unis, que se passera-t-il à cet égard, selon vous? On commence à voir quelques ouvertures.
En effet. De façon très inégale, les États adoptent des politiques différentes. Ce qu’on constate, c’est que les consommateurs ne se ruent pas aux portes des détaillants malgré les réouvertures. Cela est surtout dû au fait qu’ils n’ont pas l’impression que leur sécurité est adéquatement assurée en ce moment. On a vu la même chose du côté de la Chine.
Il faudra donc du temps pour que la confiance revienne et pour que les gens se sentent à l’aise de quitter leur domicile et de se déplacer à l’intérieur du pays. Les espaces publics, comme les parcs et les plages, sont des endroits où les gens se sentent très à l’aise d’aller.
Mais ça ne stimule pas l’emploi ni l’activité économique. Donc, même si c’est bon pour la santé mentale, l’exercice et la socialisation... Ça nous manque tous... Ça n’est pas un catalyseur d’un contexte économique plus favorable.
Vous avez mentionné qu’il fallait surveiller la Chine pour voir ce qu’ils faisaient. Ce à quoi devrait ou ne devrait pas ressembler, j’imagine, un plan de reprise.
Oui. Bon... La Chine a été le premier pays à entrer dans la pandémie et à en sortir. Les premiers à suivre des règles de distanciation sociale et à être touchés, et on observe déjà que la reprise semble vouloir y perdurer. Les données de mars l’indiquent bien, tant au chapitre des manufactures que des services. Les usines ont amorcé le bal et les entreprises de services ont progressivement suivi.
Maintenant, on a les données d’avril pour la Chine. La bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas comme si s’il y avait eu un rebond technique, en mars, et que la situation s’était détériorée en avril. Il semblerait que la tendance se poursuive, ce qui est bien.
Avec le temps, plus de personnes sortiront de chez eux et apprivoiseront la distanciation sociale. Ils interagiront davantage avec les détaillants, les restaurants et les autres commerces. On espère voir une tendance semblable en Amérique du Nord, mais ça dépendra du nombre de personnes qui auront confiance dans le processus.
Je suis curieuse... Si on pense à la situation dans non pas une ou deux années, mais dans plusieurs années, je ne sais pas si je dois me dire que ce n’est pas assez long pour que les comportements changent vraiment ou que le changement sera profond.
Qu’en pensez-vous? Je veux dire, à quoi ressemblera l’économie mondiale dans quelques années, selon vous, en raison de ce qui se passe actuellement?
Eh bien, je pense que tout dépend de l’évolution sur le plan de la santé. Habituellement, ce qu’on observe, c’est que les gens ont tendance à revenir à leurs vieilles habitudes. Mais il faut se sentir à l’aise de le faire.
Donc, ça dépend un peu de la découverte d’un vaccin ou, à défaut, d’un bon traitement qui limiterait les séjours dans les hôpitaux ou augmenterait les chances de survie. Ça rendrait probablement les gens plus à l’aise de recommencer à se comporter comme avant la crise.
Au fur et à mesure qu’on avancera dans le temps, l’effet sera plus grand quand on pense à ce qui s’est produit sur le plan des réponses politiques. On pense que les taux d’intérêt demeureront très bas encore longtemps.
Alors, même si on amorce la reprise économique, il est beaucoup plus facile pour les banques centrales de réduire les taux que de les augmenter. Il y aura un écart excédentaire. On pense donc qu’on verra des taux très bas pendant encore une longue période de temps.
Ça durera encore un bon bout de temps. Ensuite, il y a un autre facteur qui, en regardant vers l’avenir, ne sera pas facile à dissiper, et c’est le montant des dépenses publiques. Oui, les gouvernements ont dépensé six fois plus que ce qu’ils auraient dépensé lors d’une crise financière mondiale.
Les niveaux de déficit et de dette sont donc beaucoup plus élevés. Cela suggère que quelqu’un devra payer la note au bout du compte. Après tout, l’argent ne tombe pas du ciel.
C’est donc un héritage, lors de la reprise, que le gouvernement laissera. Après avoir assumé son rôle de soutien, il devra faire des choix plus difficiles quant à la façon dont il dépensera son argent et d’où les fonds proviendront, c’est-à-dire au chapitre de l’assiette fiscale. Les répercussions fiscales pourraient donc être plus importantes à l’avenir.
Le marché de l’emploi américain continue de souffrir du coronavirus. Le dernier rapport d’ADP montre que les emplois dans le secteur privé ont chuté de plus de 20 millions en avril. Il s’agit de la pire perte d’emploi enregistrée depuis que le rapport existe.
Les mauvaises nouvelles économiques se succèdent : l’Union européenne prévoit une contraction de 7,4 % de l’économie de la région cette année en raison de la COVID-19, ce qui représenterait le pire choc économique depuis la Grande Dépression.
Sur le plan des bénéfices, Shopify a annoncé un bénéfice trimestriel inattendu et des ventes plus élevées, les utilisateurs ayant visité la plateforme en plus grand nombre après que les mesures de confinement aient forcé les commerçants à déplacer leurs activités en ligne.
Le bénéfice de Disney, lui, a connu une chute vertigineuse de 91 % au cours des trois premiers mois de l’année, ce qui révèle toute l’ampleur des conséquences de la pandémie de coronavirus sur le Magic Kingdom.
Enfin, un restaurant néerlandais a trouvé une façon ingénieuse d’offrir des repas en plein air de qualité à l’ère du coronavirus : l’entreprise a construit des petites cabanes en verre qui, agissant comme un cocon intime, peuvent abriter deux ou trois personnes sur une terrasse publique.
Ça fait le tour des nouvelles du jour. Voici maintenant la discussion de Kim Parlee avec Beata Caranci.
Beata, le graphique qu’on vient de regarder montre que les économies avancées subissent des pressions beaucoup plus fortes que les économies émergentes en 2020, même si tout le monde est durement touché. Pourquoi?
Eh bien, d’une part, c’est que la Chine figure parmi les marchés émergents, et qu’elle a été touchée plus tôt que les économies avancées. Elle a déjà entamé sa reprise. Et la Chine occupe une grande part des marchés émergents.
Du côté des économies avancées, la plupart des arrêts conjoncturels ont eu lieu en mars, débordant jusqu’en avril et en mai. En fonction des données sur les PIB que nous obtenons, la situation est assez désastreuse dans ces régions. Les contractions au premier trimestre ont atteint 14 % pour la zone euro.
Aux États-Unis, elles se situent plutôt aux alentours de 5 %. On n’a pas encore les données pour le Canada, mais on s’attend à une contraction d’environ 10 %. Et ça, c’est pour le premier trimestre, ce qui ne correspond pas au creux de la récession.
Celui-ci a plutôt eu lieu en avril, ce qui nous amène au deuxième trimestre. Les pourcentages y tourneront fort probablement plus aux alentours de 40 %. Dans tout ça, il y a un facteur de temps, puis, de fonctionnement des cycles de reprise.
Est-ce qu’on pourrait approfondir la question entourant le PIB et les emplois au Canada et aux États-Unis? Vous avez parlé des premiers trimestres. Mais qu’est-ce qui se passera au-delà de cela, selon vous?
Eh bien, le rapport sur les emplois du mois d’avril va sortir vendredi, tant pour les États-Unis que le Canada, et ça devrait être l’un des pires rapports jamais observés avec les pertes d’emploi massives dont on a été témoin.
Nous savons qu’il y a eu 30 millions de demandes de prestations d’assurance-chômage aux États-Unis, et ça représente uniquement les demandes de prestations présentées... au cours d’une période de six semaines. C’est un taux de chômage incroyable élevé sur un court laps de temps.
Selon nous, les pertes d’emploi au Canada oscillent dans les trois à quatre millions juste pour le mois d’avril. Ça fait suite aux pertes d’emplois de mars, évaluées à environ un million.
On atteint donc le creux des statistiques en avril. Ce qui compte maintenant, à l’approche des mois de mai, juin et juillet, alors que les gouvernements ont annoncé des stratégies de réouverture, c’est de savoir quelle proportion de ces travailleurs retournera au travail, outre ceux visés par le programme de subvention salariales, au Canada; car on sait que ceux-ci seront rappelés par leur employeur.
La subvention couvre 75 % de leur revenu, et ce, même s’ils ne travaillent aucune heure. Ils sont donc liés à leur employeur, sans nécessairement cumuler des heures pour le moment, parce que l’employeur ne les utilise pas de façon productive.
Il faut se demander si, avec l’arrivée des mois d’été, ces travailleurs contribueront à l’exploitation des activités. Parce que ni le gouvernement ni leur employeur va pouvoir, essentiellement, couvrir cette période pendant très longtemps. Fondamentalement, on a jusqu’à l’été pour voir comment cette reprise se déroulera.
Je sais que vous avez parlé tantôt à un groupe de collègues à propos des effets à long terme qu’a eu le chômage par le passé. Pouvez-vous nous expliquer un peu plus en détail ce que ça signifie et signifiera, entre guillemets, sur le plan de la « relance de l’économie », parce que ça ne sera pas que noir ou blanc.
Oui. Les plans de reprise sont progressifs et longs. Ce que les données sur l’emploi de mars nous disent et, on verra si la situation se dégradera davantage en avril, c’est que les jeunes sont beaucoup plus durement touchés.
Par exemple, les jeunes de 15 à 24 ans ont enregistré 40 % des pertes d’emplois en mars. Ça équivaut à environ trois fois plus que leur représentation de la population active. C’est donc un pourcentage assez élevé. Bon nombre de ces pertes correspondent à des emplois à temps partiel, mais pas totalement.
Donc, ce qu’on sait, c’est qu’en période de récession-- et c’est là que la longévité compte vraiment si l’économie ne se remet pas sur la bonne voie-- la stigmatisation de ce segment de la population peut durer assez longtemps.
Il y a eu ce qu’on appelle des études longitudinales; elles suivent les gens au fil du temps, au fur et à mesure qu’ils vieillissent. Selon ces études et les récessions antérieures, il peut falloir de 10 à 15 ans pour revenir au potentiel de revenu que vous auriez eu si vous aviez obtenu votre diplôme dans un contexte économique plus favorable.
La chance compte donc sur le plan du moment où vous intégrez la population active. De toute évidence, les employeurs auront initialement trop d’employés en raison des réouvertures progressives prévues. Par conséquent, la population plus jeune pourrait ne pas avoir de nombreuses occasions de perfectionner leurs compétences.
Ce qu’on pourrait voir, au début de l’année prochaine et l’année suivante, ce sont des gens qui accepteront d’effectuer un boulot pour lequel ils sont surqualifiés. Ce qui se traduira par un taux plus élevé de sous-emploi.
Ce sera donc... au sein de cette génération que les cicatrices seront probablement les plus marquées. Même si on pense que les fortes contractions seront plutôt temporaires du côté de l’économie canadienne, la période de reprise et la stigmatisation pourraient durer assez longtemps.
De toute évidence, on observera cela partout, pas seulement au Canada. Si on regarde du côté des États-Unis, que se passera-t-il à cet égard, selon vous? On commence à voir quelques ouvertures.
En effet. De façon très inégale, les États adoptent des politiques différentes. Ce qu’on constate, c’est que les consommateurs ne se ruent pas aux portes des détaillants malgré les réouvertures. Cela est surtout dû au fait qu’ils n’ont pas l’impression que leur sécurité est adéquatement assurée en ce moment. On a vu la même chose du côté de la Chine.
Il faudra donc du temps pour que la confiance revienne et pour que les gens se sentent à l’aise de quitter leur domicile et de se déplacer à l’intérieur du pays. Les espaces publics, comme les parcs et les plages, sont des endroits où les gens se sentent très à l’aise d’aller.
Mais ça ne stimule pas l’emploi ni l’activité économique. Donc, même si c’est bon pour la santé mentale, l’exercice et la socialisation... Ça nous manque tous... Ça n’est pas un catalyseur d’un contexte économique plus favorable.
Vous avez mentionné qu’il fallait surveiller la Chine pour voir ce qu’ils faisaient. Ce à quoi devrait ou ne devrait pas ressembler, j’imagine, un plan de reprise.
Oui. Bon... La Chine a été le premier pays à entrer dans la pandémie et à en sortir. Les premiers à suivre des règles de distanciation sociale et à être touchés, et on observe déjà que la reprise semble vouloir y perdurer. Les données de mars l’indiquent bien, tant au chapitre des manufactures que des services. Les usines ont amorcé le bal et les entreprises de services ont progressivement suivi.
Maintenant, on a les données d’avril pour la Chine. La bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas comme si s’il y avait eu un rebond technique, en mars, et que la situation s’était détériorée en avril. Il semblerait que la tendance se poursuive, ce qui est bien.
Avec le temps, plus de personnes sortiront de chez eux et apprivoiseront la distanciation sociale. Ils interagiront davantage avec les détaillants, les restaurants et les autres commerces. On espère voir une tendance semblable en Amérique du Nord, mais ça dépendra du nombre de personnes qui auront confiance dans le processus.
Je suis curieuse... Si on pense à la situation dans non pas une ou deux années, mais dans plusieurs années, je ne sais pas si je dois me dire que ce n’est pas assez long pour que les comportements changent vraiment ou que le changement sera profond.
Qu’en pensez-vous? Je veux dire, à quoi ressemblera l’économie mondiale dans quelques années, selon vous, en raison de ce qui se passe actuellement?
Eh bien, je pense que tout dépend de l’évolution sur le plan de la santé. Habituellement, ce qu’on observe, c’est que les gens ont tendance à revenir à leurs vieilles habitudes. Mais il faut se sentir à l’aise de le faire.
Donc, ça dépend un peu de la découverte d’un vaccin ou, à défaut, d’un bon traitement qui limiterait les séjours dans les hôpitaux ou augmenterait les chances de survie. Ça rendrait probablement les gens plus à l’aise de recommencer à se comporter comme avant la crise.
Au fur et à mesure qu’on avancera dans le temps, l’effet sera plus grand quand on pense à ce qui s’est produit sur le plan des réponses politiques. On pense que les taux d’intérêt demeureront très bas encore longtemps.
Alors, même si on amorce la reprise économique, il est beaucoup plus facile pour les banques centrales de réduire les taux que de les augmenter. Il y aura un écart excédentaire. On pense donc qu’on verra des taux très bas pendant encore une longue période de temps.
Ça durera encore un bon bout de temps. Ensuite, il y a un autre facteur qui, en regardant vers l’avenir, ne sera pas facile à dissiper, et c’est le montant des dépenses publiques. Oui, les gouvernements ont dépensé six fois plus que ce qu’ils auraient dépensé lors d’une crise financière mondiale.
Les niveaux de déficit et de dette sont donc beaucoup plus élevés. Cela suggère que quelqu’un devra payer la note au bout du compte. Après tout, l’argent ne tombe pas du ciel.
C’est donc un héritage, lors de la reprise, que le gouvernement laissera. Après avoir assumé son rôle de soutien, il devra faire des choix plus difficiles quant à la façon dont il dépensera son argent et d’où les fonds proviendront, c’est-à-dire au chapitre de l’assiette fiscale. Les répercussions fiscales pourraient donc être plus importantes à l’avenir.