
Après une hausse de plus de 30 % cette année, les prix du WTI ont plongé cette semaine. La hausse du dollar américain, la hausse des stocks de pétrole brut aux États-Unis et les retards dans la campagne de vaccination en Europe ont pesé sur le marché. Kim Parlee s’entretient avec Michael O’Brien, gestionnaire de portefeuille à Gestion de Placements TD.
À vrai dire, oui, Kim. Si vous m’aviez demandé il y a neuf mois si le cours du pétrole dépasserait les 60 $, je vous aurais dit « certainement pas ». C’est donc une agréable surprise, oui. C’est plutôt une question d’offre que de demande. Mais à l’heure actuelle, c’est un excellent prix pour les producteurs nord-américains.
Eh bien, analysons la situation et parlons de l’offre et de la demande. Commençons par la demande. Il semble que ce ne soit pas tant une question de demande, si on réfléchit à ce qui nous attend. Mais qu’anticipez-vous sur le plan de la demande?
C’est encourageant. La demande augmentera plus tard cette année, quand l’économie rouvrira. C’est ce qu’on espère tous depuis le début, que tout le monde pousse un soupir de soulagement en voyant les gens reprendre l’avion, voyager et se déplacer. Et quand ça arrivera, la demande de pétrole se rapprochera de 100 millions de barils par jour, c’est-à-dire le niveau d’avant la pandémie.
Mais en fait, si les prix du pétrole se sont raffermis beaucoup plus vite que prévu, c’est surtout à cause de l’offre. L’OPEP, contrairement à ce qu’elle a fait l’année dernière en tirant le tapis et en inondant le marché alors que les gens n’avaient pas besoin de tout ce pétrole, a fait preuve d’une très bonne intendance. Et l’OPEP ne cache pas le fait qu’elle essaie de favoriser un marché tendu et de réduire une partie des stocks excédentaires. C’est donc une gestion beaucoup plus constructive de la part de l’OPEP, je dirais.
Combien de temps pensez-vous que ça va durer?
Quand la demande commencera à se rétablir – et on le voit déjà. Les données les plus récentes, ou du moins très récentes en provenance des États-Unis sur le nombre de gens qui prennent l’avion, par exemple, ces chiffres sont encourageants. Nous allons dans la bonne direction. Je crois que plus la demande augmente, plus c’est facile pour l’OPEP de maintenir sa position, parce que son véritable but, c’est... Quand le gâteau grossit, c’est beaucoup plus facile de le partager.
L’année dernière a été très difficile, parce que le gâteau a rapetissé si rapidement, la demande s’est contractée si vite que personne n’a pu recevoir une part satisfaisante par rapport à sa situation sur le marché du pétrole. Je pense donc que si les économies ouvrent et que l’accélération de la croissance est conforme aux attentes générales, ce sera... je crois qu’on se trouvera dans une situation où l’OPEP pourra remonter l’offre sur le marché de façon très ordonnée. Ça devrait être très positif pour les marchés, si on arrive à atteindre cet équilibre.
Si l’OPEP augmente l’offre sur le marché, que va-t-il se passer pour les autres producteurs? Je parle du schiste américain, ou même des sables bitumineux. Quand la situation commencera à se stabiliser, est-ce que c’est quelque chose à surveiller, du point de vue de l’offre?
Je crois que cette question va au cœur de la thèse d’un marché haussier pour les actions du secteur de l’énergie, plutôt que pour le prix du pétrole. Ne vous y trompez pas, le pétrole à plus de 60 $? Les producteurs canadiens et américains ont l’occasion de faire de l’argent.
Ce qui est vraiment important, c’est qu’on semble observer un vrai changement de comportement dans les équipes de gestion. Et plus précisément, en ce qui concerne le gaz de schiste américain. Après environ sept ans d’exploitation intense, effrénée, les investisseurs ont complètement tourné le dos à ces sociétés. Ils ont clairement fait passer le message qu’ils ne veulent pas que leurs placements soient recyclés dans plus de forage et de production. Ce qu’ils veulent, c’est du rendement. Des dividendes et des rachats d’actions.
Et ce qu’on observe jusqu’à présent, c’est que les prix du pétrole ont franchi la barre des 50 $, des 60 $... mais il n’y a pas de reprise massive des installations de forage. On ne voit pas tous ces signes qui laissent présager un boom de la production. Pour l’instant du moins, les producteurs américains et canadiens semblent faire marche arrière – ils ont changé de comportement. Ils mettent l’accent sur le flux de trésorerie disponible et le rendement pour les investisseurs, plutôt que d’accroître la production. Parce que depuis 5 ou 10 ans, cette stratégie n’a pas été payante.
Mmm. Intéressant. J’ai l’impression en vous écoutant que pour l’instant, tout n’est pas vraiment joué.
Il faudra peut-être revenir sur le sujet si la production augmente. Mais la situation semble encourageante. Michael, il ne me reste qu’une trentaine de secondes. Mais compte tenu du scénario que vous avez décrit, comment les prix du pétrole vont-ils évoluer dans les 6 à 12 prochains mois?
Je suis plutôt optimiste, mais je ne veux pas mettre la charrue avant les bœufs. Tant que la demande n’est pas revenue à au moins 100 millions de barils par jour, il y a toujours le risque que les Saoudiens, les Russes ou quelqu’un d’autre nous réserve de mauvaises surprises ou qu’un événement inattendu se produise. Donc je vois plutôt les choses sous un angle positif. Si les prix du pétrole restent stables à 60 $, 65 $, 70 $ aux deux prochains trimestres, si la demande des entreprises augmente et si les économies rouvrent, je pense que ces actions devraient offrir de bons rendements.
Mike, c’était un plaisir de vous accueillir. Merci beaucoup.
Merci, Kim.
[MUSIQUE RELAXANTE]