Uber, Airbnb et un nombre toujours croissant d’entreprises changent notre façon de vivre, de travailler et de jouer. Le service de taxi Uber et le service d’hébergement Airbnb sont les figures de proue de cette nouvelle économie du partage, même si elles ne font toujours aucun profit pour le moment. Découvrez comment certaines entreprises de « l’ancienne économie » profitent de la croissance de l’économie du partage et les façons dont les investisseurs pourraient tirer profit de ce phénomène grandissant.
Comment vous et votre portefeuille pouvez tirer avantage de l’économie du partage
avril 7, 2016
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Bonjour. Merci d’être des nôtres. Comme vous l’avez entendu, notre émission porte entièrement sur l’économie du partage, fondée sur l’utilisation du numérique pour faciliter le prêt ou la location à la demande de biens ou services entre consommateurs. Cette forme d’économie prend de l’ampleur. Constatez par vous-mêmes. Plus de 86 millions d’Américains – plus de deux adultes sur cinq – utilisent ces services et plus d’un travailleur sur cinq participe à l’économie du partage. Pour nous expliquer le phénomène, je reçois Ben Gossack, gestionnaire de portefeuille et analyste des technologies mondiales pour Gestion de placements TD. Bienvenue. Merci de m’inviter à nouveau. D’entrée de jeu, j’ai donné une définition très générale de l’économie du partage, un mouvement en plein essor. L’évolution est moins rapide au Canada, mais la vague déferle un peu partout aux États-Unis. Comment définiriez-vous l’économie du partage de votre point de vue? D’accord. L’économie du partage est un mot à la mode depuis deux ans et bien des entreprises proposent des plateformes pour faciliter le partage des ressources sous-utilisées : voitures, maisons, espaces de rangement, etc. L’idée du partage n’est pas vraiment nouvelle. Les gîtes touristiques existent depuis des années, sans parler du temps partagé et des services de partage de vélos. Mais, le modèle n’a pas été optimisé. De fait. La différence aujourd’hui, c’est que l’accès à Internet, aux téléphones intelligents et aux réseaux sans fil réduit la friction dans le partage de ces ressources. Quand vous parlez de friction, un terme de placement, vous voulez dire que les consommateurs ont accès facilement à ces ressources. Oui. Les transactions coûtent beaucoup moins cher et atteignent une échelle sans précédent. J’ai un exemple très simple qui montre la puissance de la plateforme. Si vous avez des liquidités qui dorment, il existe aux États-Unis un énorme réseau social appelé Venmo qui permet de partager vos fonds avec vos amis. Par exemple, vous pourriez m’emprunter 50 $... Vous parlez bien d’un prêt, non? Oui. Sauf que le téléphone intelligent et Internet permettent de le faire en tout temps. Avant, il fallait en discuter et peut-être se rencontrer. Vous risquiez d’oublier de me rembourser. J’aurais été mal à l’aise de vous le demander. Vous auriez dû venir me voir. Tout ça peut maintenant se faire en tout temps, n’importe où. Je vois. On peut donc vous emprunter de l’argent sur Venmo. J’en prends note et nos auditeurs également. Quelle chance vous avez! Il est intéressant de noter en particulier le rythme de croissance de certaines de ces entreprises. Vous revenez tout juste de San Francisco. Elles sont partout. Bien sûr. Les entrepreneurs cherchent à reproduire le modèle d’Uber dans tous les domaines. Mais, ce n’est pas toujours possible. Dites-nous, qu’est-ce qu’Uber pour ceux qui ne sauraient pas? D’accord. C’est une plateforme de covoiturage qui utilise le téléphone intelligent pour les réservations. Les deux principales entreprises de l’économie du partage sont Uber et Airbnb. Mais, d’autres affichent une certaine taille et sont en plein essor. Par exemple, Taskrabbit donne accès à un marché pour la main-d’oeuvre qualifiée. Ça n’est pas encore implanté au Canada. Pas encore. Aux États-Unis, il y a aussi WeWork, une société qui loue des bureaux à des entrepreneurs ou à des entreprises en démarrage. La formule leur plaît parce qu’elle permet de partager des bureaux et de collaborer. J’ai visité le site de WeWork. L’entreprise propose de partager un poste de travail de son choix sans contrainte d’horaire, de réserver son propre poste de travail ou d’obtenir un bureau. Même l’imprimante est fournie, sans parler des autres avantages. Oui. Oui. Qu’en est-il de la gestion des actifs dans tout cela? Avec du recul on se dit que c’est bien beau toute cette technologie et l’effervescence qu’elle provoque. C’est intéressant de voir comment évolue la tendance. Mais, quand vous étiez appelé à évaluer ces actifs afin de comprendre leur incidence sur vos placements futurs, vu la croissance constante de ces entreprises, vous avez dû constater que le phénomène n’était pas marginal. De fait, la croissance de ces entreprises est fulgurante. Par exemple, Uber a démarré en 2009 et est implantée dans plus de 400 villes. La création d’Airbnb date de 2008 et l’entreprise est présente dans 34 000 villes et plus de 190 pays. C’est énorme. Et la progression est rapide. En tant que gestionnaire de portefeuille, nous devons comprendre comment les entreprises que nous couvrons sont touchées. Quand j’ai pris connaissance de cette donnée, j’ai été étonnée. Elle provient, je pense, du personnel de votre équipe. Uber vaut 51 milliards. GM vaut 48 milliards. Oui. Vraiment? C’est vous dire la croissance de ces entreprises. Aux dernières nouvelles, Uber valait sans doute entre 60 et 70 milliards. L’entreprise fait-elle des bénéfices? Non. Aucune de ces sociétés ne dégage de bénéfices. Pas plus qu’elles ne possèdent d’actifs réels. Mais, ce n’est pas nécessairement mauvais. Nombre de ces entreprises lancent une plateforme et servent simplement d’intermédiaires entre les acheteurs et les vendeurs. L’importance de cette plateforme repose sur l’énorme valeur qu’elle procure à son propriétaire. Chaque transaction ne coûte presque rien. Et c’est pourquoi tant d’entreprises se ruent pour être le numéro dans le domaine du covoiturage ou même de la livraison d’aliments. J’en ai fait l’essai. Airbnb vaut 26 milliards. La chaîne Marriott, 17 5 milliards. Oui. Marriott vaut 17 milliards. Hilton, environ 22 milliards. Starwood, récemment acquise par Marriott, vaut 13 milliards. Oui, ces entreprises sont plus grosses et leur évaluation suscite bien des attentes. Très bien. Restez des nôtres. Au retour, je poursuis l’entretien avec Ben Gossack. Le sujet est fascinant et nous tâcherons de préciser qui profite de la situation du point de vue des investissements Vous regardez Money Talk. Restez à l’écoute. Je m’entretiens avec Ben Gossack, gestionnaire de portefeuille et analyste des technologies mondiales pour Gestion de placements TD. Nous discutons de l’économie du partage, un phénomène en pleine croissance dont l’ampleur est énorme. Parlons des risques associés à certaines de ces formes d’économie, que ce soit pour les exploitants à l’interne ou pour les investisseurs à l’externe, lorsque ces sociétés s’inscriront en bourse – parce qu’elles ne le sont pas à l’heure actuelle. Prenons Airbnb. Nous avons une carte à vous montrer pour illustrer la prolifération des foyers qui louent leur deuxième ou leur troisième chambre de la maison. Quel est le risque lié à la responsabilité? D’accord. L’écran présente la carte de la ville d’Austin, au Texas. Les points bleus sont des hôtels et ceux en rouge, des locations auprès d’Airbnb. Je parie que les hôtels enregistrent un peu moins d’affluence. Les hôtels d’affaires s’en tirent sans doute bien. Voilà. Oui. Les hôtels d’affaires qui proposent de bons programmes de fidélité vont bien. Mais, les établissements indépendants souffrent parce que l’abondance de l’offre exerce une pression à la baisse sur leurs prix. Mais, dans le cas d’Airbnb, le plus grand danger vient du fait que les hôtes peuvent sous-estimer le risque d’exercer ce genre d’activité. Airbnb leur offre une assurance de près d’un million de dollars qui couvre les blessures corporelles et les dommages matériels à la propriété. L’hôte peut trouver ce montant élevé. Mais, il se peut qu’un client se blesse en tombant et qu’il intente une poursuite de deux millions de dollars. Les avocats s’en mêlent… Il n’y a pas à s’en faire. Airbnb assume le premier million et l’hôte réclame le second à son assureur, qui demandera à l’hôte s’il avait déclaré l’exercice d’une activité commerciale dans sa maison. S’il n’a pas informé son assureur, l’hôte est pris en défaut. Nous sommes tellement habitués aux avantages, à la facilité d’utilisation et à l’esprit d’aventure de ces applications que nous en oublions les risques. Quelqu’un peut endommager votre propriété. C’est déjà arrivé. Oui. Je pense entre autres à des cas survenus à Calgary, si je ne m’abuse, où des propriétés ont subi des dommages. On ne sait pas à qui on loue. Bon. En parlant de risque, prenons l’exemple d’Uber. Les chauffeurs sont des entrepreneurs, et non des employés. Qu’est-ce que ça peut bien faire? Les conséquences sont importantes. OK. Le plombier, par exemple, est un entrepreneur indépendant. Il détermine lui-même son horaire de travail et les prix qu’il estime devoir facturer au client. Par contre, si vous êtes un employé, dans la restauration rapide disons, vous devez vous plier à un horaire de travail. Vous suivez des ordres. Vous portez un uniforme. Les chauffeurs représentent la principale dépense d’Uber, ce qui laisse place à une certaine ambiguïté. Uber fixe le prix de la course et congédie les chauffeurs qui ont une mauvaise cote. Mais, les chauffeurs décident de leur horaire de travail et peuvent fermer ou non l’application. La situation est donc ambiguë. Si les chauffeurs étaient considérés comme des employés, Uber devrait assumer l’entretien des véhicules, les péages, la paie. Dans ces conditions, la valeur économique d’Uber ou d’autres plateformes serait fortement remise en question. Je comprends. Nous sommes dans l’économie du travail à la pige; chacun gère son emploi. Très bien. Aucune entreprise de l’économie du partage n’est cotée en bourse, non? C’est exact. OK. Revenons au point de vue de l’investisseur, sans vouloir insinuer que vous l’aviez oublié, contrairement à moi. Je me replace dans cet esprit… voilà. Qui profite de toute la croissance actuelle? Qui sont les gagnants? Voyons les quatre noms qui retiennent votre attention. D’accord. C’est difficile de distinguer les gagnants ou les perdants. Je m’intéresse aux entreprises gagnantes, quelles que soient les circonstances. Elles bénéficient de toute cette économie du partage. Voici donc mes noms. Le premier : Visa. Oui. C’est le mode de paiement d’Uber Voilà. Exactement. Ça permet de réduire la friction; tout se paie à crédit. Visa en tire profit. Le risque est aussi moindre; les chauffeurs n’ont pas de liquidités dans leurs véhicules. Cet avantage pour la sécurité s’ajoute à l’utilisation du crédit. L’action de Visa fluctue au rythme du marché, mais elle se porte très bien depuis cinq ans. De fait. C’est aussi une plateforme comme Uber. Oui. Oui. AT&T? Oui. Nombre de ces plateformes ont été conçues pour le téléphone intelligent. Il faut compter sur un excellent réseau sans fil. AT&T est un fournisseur de service sans fil partout aux États-Unis. De la maison, vous pouvez réserver une place dans un véhicule en vous connectant à votre réseau sans Wi-Fi. C’est plus difficile si vous êtes au restaurant ou au coin d’une rue. Ces plateformes ont besoin d’un réseau sans fil; AT&T en profite. Vous aimez aussi NVIDIA. Oui. La société NVIDIA, le chef de file mondial des semi-conducteurs destinés aux ordinateurs de visualisation, est bien connue dans le domaine des jeux ou de la réalité virtuelle. Elle s’apprête à lancer une application dans le secteur de l’automobile. À l’heure actuelle, les véhicules possèdent des chauffeurs. Mais, avant longtemps, l’informatique prendra le volant, créant une espèce de superordinateur monté sur roues. NVIDIA fournira les semi-conducteurs qui en seront le cerveau. L’entreprise exploite aussi des systèmes d’infodivertissement. La domination des robots, c’est pour bientôt. Comcast. Pourquoi Comcast? Oui. Comcast est un câblodistributeur. Quel est son lien avec l’économie du partage? Les consommateurs aiment bien des aspects d’Uber, et nombre d’entreprises traditionnelles peuvent les adapter à leur modèle de service à la clientèle. Disons qu’un technicien doit passer chez vous. Il y a maintenant une application qui vous permet de le voir durant son déplacement. Vous avez sa photo et pouvez évaluer la qualité du service après la visite. L’idée vise à offrir une meilleure expérience aux clients, à réduire leur roulement et à augmenter les revenus et la rentabilité. OK. J’ai deux questions avant de vous laisser partir. Vous venez de parler de rentabilité. Combien de temps croyez-vous que les entreprises de l’économie du partage mettront à dégager des bénéfices ou à décevoir les consommateurs parce qu’elles n’y arrivent pas? OK. Je placerais ces entreprises dans deux catégories différentes. On commence à réévaluer les entreprises en croissance et à exiger qu’elles soient rentables maintenant et produisent des flux de trésorerie. Mais, dans le cas d’Uber et d’Airbnb, la croissance prévue est si forte, sans oublier que ces entreprises doivent devenir le numéro un pour concrétiser les avantages de leurs plateformes, que leurs évaluations demeureront élevées. La rentabilité peut donc attendre. Je vois. OK. Vous rentrez tout juste d’un voyage dans l’Ouest. Qu’avez-vous observé? Qu’y a-t-il à signaler? Oui. L’informatique arrive à un tournant. À l’origine, les ordinateurs servaient à faire des calculs à notre place. On a ensuite compris comment les programmer, ce qui a décuplé la productivité en automatisant tous les processus. Et maintenant une nouvelle ère s’amorce. Les ordinateurs se rapprochent de l’intelligence humaine et peuvent gérer des données historiques, faire des inférences et prendre des décisions. La productivité s’en trouvera révolutionnée. Des entreprises comme Microsoft, IBM et Google sont à l’avant-garde de ce mouvement. Microsoft a bien tenté une incursion dans les médias sociaux, mais sans grand succès. L’entreprise a donc du travail à faire dans ce domaine. J’espère ne pas être remplacée par un robot. Moi non plus. Vous n’avez rien à craindre. La discussion est toujours aussi agréable, Ben. Je vous en prie. Très bien. Ben Gossack, gestionnaire de portefeuille et analyste des technologies mondiales pour Gestion de placements TD.