Il ne fait aucun doute que les femmes en entreprise font encore face à une multitude d’obstacles. Sally Helgesen, coauteure du livre How Women Rise, soutient que les femmes doivent délaisser les comportements traditionnels et les définitions actuelles du succès. Elle discute avec Kim Parlee des raisons pour lesquelles les femmes doivent se concentrer non pas sur le travail pour lequel elles ont été embauchées, mais plutôt sur leur propre ambition.
On nous dit souvent que l’excellence au travail est un moyen sûr d’être reconnu et de progresser dans le monde des affaires. Mais selon notre prochaine invitée, ce n’est peut-être pas le cas pour les femmes. Selon elle, être excellente dans ce que vous faites peut en fait enfermer les femmes dans leur rôle actuel. Et c’est l’une des 12 habitudes que les femmes doivent perdre si elles veulent progresser.
Sally Helgesen est auteure, conférencière et spécialiste du leadership au féminin. Et elle est coauteure du livre How Women Rise, perdre les 12 habitudes qui vous empêchent d’obtenir votre prochaine augmentation, votre prochaine promotion ou votre prochain emploi. Je lui ai parlé plus tôt.
Si vous misez tout sur la croyance que faire votre travail à la perfection va vous mener à votre prochain emploi, votre prochain poste, vous vous faites probablement avoir parce que vous concentrez votre attention sur l’exécution parfaite de chaque détail plutôt que sur l’établissement de liens et sur la visibilité, qui sont beaucoup plus importants pour passer au niveau supérieur.
Je travaille avec beaucoup de femmes qui font cette erreur. Elles sont laissées pour compte, puis elles se plaignent. Elles disent qu’elles étaient bien meilleures que le type qui a été promu. Mais le type qui a été promu s’assurait que ce qu’il faisait avait beaucoup de visibilité et qu’il recevait du soutien pour le faire. Et ça peut être une surprise plutôt désagréable.
Oui, en effet. Permettez-moi de vous poser une question... et je veux être prudente, on ne dit pas ici que toutes les femmes font ceci ou que tous les hommes font cela. Mais il y a des tendances, et je sais...
C’est exact.
...que vous les avez étudiées. Pourquoi les femmes ont-elles plus tendance à faire un excellent travail en gardant la tête baissée et à faire le contraire de ce que les hommes ont tendance à faire.
Je pense que quand les femmes le font, et ce ne sont pas toutes les femmes qui le font, encore une fois, et ce ne sont pas tous les hommes qui font autrement, je pense que quand les femmes le font, c’est parce qu’elles manquent de confiance en elles, comme si elles devaient prouver qu’elles sont les meilleures. Elles ont peut-être déjà vécu des situations où les gens doutaient qu’elles étaient la bonne candidate pour un poste et elles se sont laissées prendre au piège de toujours essayer de prouver leurs compétences.
Et devinez quoi? Ça les a bien servies au début de leur carrière. Mais quand on cherche à gravir les échelons, les compétences politiques et la visibilité et les liens qu’on tisse sont beaucoup plus déterminants dans notre avancement.
Je sais que votre livre est rempli d’exemples concrets des 12 habitudes qui nous retiennent, et on va y revenir dans un instant. Mais pouvez-vous nous donner un aperçu de ce que les femmes devraient faire différemment de ce qu’elles font actuellement?
Eh bien, je pense que les femmes doivent penser sérieusement à bâtir des alliances dès le premier jour de travail, ne pas se dire je vais baisser la tête, maîtriser les compétences, puis relever la tête et commencer à bâtir des alliances, elles devraient faire les deux en même temps.
Les femmes doivent aussi, si elles ne le font pas déjà, être très astucieuses pour revendiquer le mérite de leurs contributions. Je vois souvent des femmes qui ont fait une contribution vraiment extraordinaire et qui disent « oh, c’était mon équipe.
Oh, c’était mon patron. »
Même si l’esprit d’équipe est important et qu’il est important de partager la gloire avec son patron, il faut aussi se tenir debout, apprendre à s’attribuer le mérite et ne pas attendre que les autres remarquent vos contributions et les valorisent spontanément si vous ne les avez pas fait connaître clairement.
Comme je l’ai mentionné, vous parlez un peu au début du livre des vertus nobles qui animent les femmes et qui les amènent à agir comme elles le font. Ensuite, il y a les 12 habitudes. Vous venez de parler de l’une d’elles, qui consiste à s’attendre à ce que les autres vous remarquent et vous récompensent. Il y en a une ici qui a attiré mon attention -- la maladie de plaire? Qu’est-ce que c’est?
Oui. La maladie de plaire est un des comportements qui peut vraiment aider les femmes au début de leur carrière mais qui peut aussi tuer leur carrière plus tard, à des niveaux plus élevés. Et la maladie de plaire c’est essentiellement concentrer tous vos efforts pour que tout le monde pense que vous êtes une personne merveilleuse, qui répond aux attentes de tous, qui essaie de les dépasser, et essayer d’être aimée par tout le monde.
Ça va vous permettre d’atteindre un certain niveau parce que les gens aiment être entourés de personnes merveilleuses. Mais après un certain niveau, ça va être très difficile d’établir vos limites. Vous allez avoir beaucoup de difficulté à responsabiliser les autres. Et comme je l’ai vu en travaillant avec des femmes qui ont ce problème, vous allez finir par faire le travail des autres pour eux parce que vous ne voulez pas qu’ils échouent. Mais ça ne les aide pas, et vous vous sentez vite dépassée.
Alors que devriez-vous faire? Si vous ne voulez pas plaire à tout prix, qu’est-ce que vous devriez faire?
Eh bien, quand vous passez à un niveau supérieur, ce que vous devez faire, de toute évidence, vous devez être une personne très agréable, ouverte, ouverte aux critiques et aux louanges, mais quand vous donnez une responsabilité à une personne, vous devez vraiment la tenir responsable. Vous devez indiquer clairement que vous le faites parce que vous voulez qu’elle ait la chance d’acquérir les compétences nécessaires pour bien faire son travail, plutôt que de toujours intervenir.
L’un des aspects intéressants de la maladie de plaire, d’après mon expérience, c’est que les femmes qui ont laissé cette maladie les diminuer au travail diminuer se laissent aussi diminuer à la maison. Elles essaient toujours de plaire et d’anticiper ce que leurs enfants et ce que leur mari veulent, à un point tel que ça peut être vraiment épuisant et exagéré.
Je pense que beaucoup de femmes ont dressé l’oreille quand vous avez dit ça.
[RIRES] Une autre habitude dont vous parlez est de minimiser. Qu’est-ce que vous voulez dire par minimiser?
Minimiser, c’est utiliser des expressions comme « j’ai seulement une petite chose à dire » ou « ça ne prendra qu’une minute ». Vous faites un préambule qui suggère que ce que vous dites n’est pas vraiment important. De nombreuses femmes ont l’habitude de s’excuser constamment, c’est bien connu. Elles ne peuvent pas ouvrir une porte sans dire qu’elles sont désolées.
Mais c’est aussi avoir un langage corporel qui consiste à essayer de se faire la plus petite possible pour montrer aux autres qu’il y a de la place pour eux. En fait, c’est essentiellement un comportement de soumission.
Vous devez trouver quelque chose entre les deux, pas « Je suis une femme, entendez-moi gronder », mais un compromis qui vous permet de vous affirmer physiquement et verbalement et de défendre votre position sans toujours reculer. On constate ce comportement surtout chez les jeunes femmes.
Vous avez mentionné les jeunes femmes. C’est intéressant, car vous parlez beaucoup des femmes de la génération Y. En fait, vous soulignez le fait qu’elles semblent mieux placées que les femmes plus âgées pour ne pas avoir ces mauvaises habitudes.
Eh bien, je pense que dans une certaine mesure, c’est très vrai, surtout pour l’habitude qu’on a mentionnée plus tôt selon laquelle on s’attend à ce que les autres remarquent et apprécient spontanément nos contributions. Les jeunes de la génération Y semblent beaucoup plus à l’aise pour revendiquer le mérite de leurs contributions et ont un plan pour attirer l’attention sur ce qu’ils font.
Mais la minimisation et une autre habitude de communication, que nous appelons trop d’information, qui consiste à en dire trop, à fournir trop d’information est un piège dans lequel tombent beaucoup de femmes de la génération Y. Je pense donc que l’une des raisons pour lesquelles ce livre, How Women Rise, connaît tellement de succès, c’est que les femmes de tous les âges et à tous les niveaux s’y identifient.
C’était Sally Helgesen, auteure, conférencière, spécialiste du leadership au féminin et co-auteure du livre How Women Rise.
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