
Le président américain Joe Biden a révoqué le permis de construction du pipeline Keystone XL, qui aurait transporté le pétrole canadien vers la côte américaine du golfe du Mexique. Anthony Okolie discute avec James Hunter, analyste des infrastructures mondiales, Gestion de Placements TD, des conséquences pour le secteur canadien de l’énergie.
James, l’un des premiers gestes du président Biden, lorsqu’il est entré en fonction, a été d’accroître l’effort de lutte contre le changement climatique, notamment en annulant par décret présidentiel le permis de prolongement du pipeline Keystone XL. Que savons-nous à ce jour et quelles sont les conséquences de cette décision?
Ouais, vous avez tout à fait raison, Anthony. Rappelons-nous que les pipelines Keystone, Trans Mountain et Mainline sont des pipelines déjà existants qui servent au transport du pétrole, mais les projets de prolongement sont très importants sur le plan économique. Le président Biden a révoqué le permis de TC Energy concernant la construction de Keystone XL cette semaine, comme il l’avait promis pendant sa campagne électorale, alors ç’a n’a probablement pas été une grande surprise.
L’annulation du projet a de nombreuses conséquences. Ça aura un effet négatif sur le profil de croissance de TC Energy, mais un effet positif sur le pipeline Mainline d’Enbridge, qui fera face à moins de concurrence. Et ça aura un effet négatif sur les producteurs canadiens de pétrole et de gaz, qui auraient eu un autre moyen d’accès à faible coût aux marchés finaux américains.
De toute évidence, la nouvelle a eu un impact sur le marché de l’énergie. Pouvez-vous nous éclairer sur ce qui s’est produit? La réaction a-t-elle été exagérée?
Ouais, nous avons assurément observé ça, et nous aussi nous nous interrogeons. Keystone XL aurait probablement représenté environ 7 $ par action pour TC Energy, soit entre 10 et 15 % du cours de l’action si le projet avait été réalisé, mais je pense que le montant était déjà soustrait du cours de l’action, en grande partie sinon en totalité, alors je pense que la réaction a été exagérée.
La déception tient surtout, probablement, au fait qu’il s’agissait d’un excellent projet sous l’aspect des contrats avec les expéditeurs et de l’accord de partage des risques avec le gouvernement de l’Alberta. Ça peut tenir aussi aux interrogations quant à ce que TC Energy va faire. Une importante opération de fusion ou d’acquisition pourrait ne pas être bien accueillie.
Par ailleurs, le pipeline Keystone XL retient beaucoup l’attention des médias, mais il y a d’autres grands projets de pipelines en cours de réalisation. Comment est-ce qu’ils avancent?
Eh bien, je suis heureux de dire qu’ils avancent. Il y a le prolongement de Trans Mountain, qui appartient au gouvernement du Canada, destiné à transporter le pétrole d’Edmonton à Vancouver, dont le chantier progresse conformément au calendrier, qui prévoit une mise en service d’ici 2022. Le chantier a ralenti récemment en raison d’incidents concernant la sécurité survenus à la fin de l’année dernière et de restrictions d’ordre général concernant la COVID-19.
L’autre projet concerne le remplacement du pipeline 3 d’Enbridge, destiné à transporter le pétrole dans l’autre direction, vers les Grands Lacs, au Wisconsin. La construction du tronçon canadien a été achevée l’année dernière. Du côté américain, nous avons reçu les permis d’État et les permis fédéraux encore manquants en novembre, alors la construction est autorisée. Ça avance. Et le calendrier de construction est passablement court, de façon à permettre la fin des travaux, espérons-le, cette année.
Que pensez-vous du secteur des pipelines en ce moment, compte tenu de tous les changements survenus au cours des derniers mois?
Ouais, eh bien, la réalisation de l’un ou l’autre des projets serait une bonne chose, car nous n’avons pas la capacité de transport par pipeline nécessaire pour tout acheminer vers le marché. Le reste, soit environ 250 000 barils par jour, est transporté par chemin de fer, ce qui est plus coûteux et moins sécuritaire. Alors, nous allons dans la bonne direction.
Nous demeurons raisonnablement optimistes vis-à-vis d’Enbridge et de TC Energy, en partie en raison d’une valeur raisonnable, mais aussi parce que le redémarrage des activités mises à l’arrêt va profiter aux pipelines, en ce sens que ça va entraîner une accélération de la croissance économique, ce se traduit généralement par une hausse des prix des produits de base. Conséquemment, les clients des pipelines vont jouir d’une meilleure situation financière et vont davantage pouvoir exploiter leurs possibilités de croissance.
Quel est le principal point à retenir si l’on détient des placements dans le secteur de l’énergie ou si l’on songe à investir dans ce secteur à un moment donné?
Ouais. Je voulais mentionner aujourd’hui que nous avons vu Enbridge augmenter son dividende en décembre, ce qui était bien, mais seulement de 3 %, soit probablement l’une des plus faibles hausses observées depuis très, très longtemps. Pour les investisseurs, c’est un signal important de repli des perspectives de croissance et de repli très important. C’est une tendance dont les investisseurs doivent être conscients.
Ils doivent également surveiller la transition à d’autres types d’investissements en infrastructures énergétiques, peut-être à des types plus propres de combustibles fossiles, comme le gaz naturel, ou même à des énergies renouvelables comme l’énergie éolienne et l’énergie solaire. Ce n’est que le début pour ces thèmes, mais je crois que ça contribuerait vraiment à donner confiance aux investisseurs dans le profil de croissance des dividendes versés par les titres de pipelines.
James, merci d’avoir participé à cette webdiffusion.
Merci, Anthony.
[MUSIQUE DE GÉNÉRIQUE]
[MUSIQUE]